Héritiers du makoa loa

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 Expédition de jeunesse

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Bene'Zia

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MessageSujet: Expédition de jeunesse   Expédition de jeunesse Icon_minitimeDim 29 Sep 2019 - 15:06

Première partie: A l'orée du val.


Nous étions une trentaine tout au plus, chevauchant ravasaures et navrecornes harnachés fièrement d'or et de plumage aux couleurs chatoyantes. Nos armures et accoutrement scintillaient, redessinant nos statures guerrières, et nos flambeaux étaient levés haut vers les cieux. Nos armes étaient soigneusement aiguisées, nos fasciés fermés et emplis de fierté.
Notre parade traversait Dazar'alor, d'un bout à l'autre de la cité d'or, sous les yeux emplis d'admiration de nos semblables. D’en-bas, j'imaginais notre Roi face au grand sceau, suivant notre avancée dans la jungle jusqu'à la frontière de Nazmir. Ma mâchoire se crispait d'excitation à cette idée, si j'avais su...

La troupe dans la qu'elle j'étais n'était qu'un regroupement de trois éclaireurs et le reste des soldats d'une même génération. Une petite dizaine d'entre eux était en vérité plus des chasseurs qu'autre chose. Nous n'avions pour but que de rassurer la population, qu'un raid contre les Trolls de l'autre côté de la jungle, qu'une affaire minime contre des sauvages sans armures ni armes dignes de ce nom.

Moi, Bene'Zia, je poursuivais encore ma formation Druidique. J'aurais suivi ma mentor à l'autre bout du monde si elle me l'avait demandé. Elle, c'était Yato'Sa, et à côté d'une t-elle femme, je semblais bien freluquet. Elle avait une chevelure claire et un visage blanc. De son aura émanait une forme de puissance et de sagesse infinies. Elle n'était qu'à quelques enjambées de moi, au devant du groupuscule que nous formions, et je peinais à profiter des verdoyants horizons quand elle était si proche. Bah ... Je n'étais pas la seule. Ya'zir, mon aîné de deux années tout au plus, s’imaginait un jour pouvoir la conquérir. Il faut dire qu'il ne manquait pas de charisme dans son genre, bien que prétentieux au possible.
Je rêvassais à me voir à la place de l'un ou de l'autre : un jour une Druide aux savoir dévastateurs, un autre à la place de se crétin de Ya'zir, faisant chavirer le cœur des hommes comme des femmes.

Je n'avait pas vu le soleil faiblir et la terre se ramollir sous la démarche lasse de nos montures tant je m'amusais à dissuader mon confrère de la moindre approche. Nous étions à l'orée de Nazmir. Je me retournais par instinct, comme un enfant à la recherche des bras de sa mère, et je fus à demi-rassurée de voir au loin les dorures de ma cité. Une brise légère, odorante, nous rappelait l'humidité boueuse et gluante qui nous attendait au delà de notre terre natale.

Nous avions décidé, d'un commun accord, de poser le camp proche des ruines de Zul'jan. Le lieu grouillait de charançons, de saurides infectés, et d'une multitude d'autres bestioles dont je n'aurai le cœur à les décrire. Quelque chose grouillait sous la terre vaseuse et la pluie arrivait sans attendre en faisant gronder les cieux au dessus des cimes boisées tortueuses et informes. Le rugissement sourd des raptors sauvages et le vol sinistre d'un pterreurdactyle aux écailles sombres à quelques centaines de pas n'avaient rien de rassurant.

Il fallait pourtant être efficace : monter les tentes, assurer les feux, trouver un lieu approprié pour nos bêtes à l'écart des prédateurs et organiser les premières rondes.  Cette nuit là je me suis écroulée aux côtés de Ya'zir. Il avait ce quelque chose d’insupportable mais attirant. Je mentirai si je disais ne pas avoir apprécié être à ses côtés, oubliant nos obligations l'espace de quelques instants à l'abri des regards, sous notre tente. Ce n'était pas franchement l'attitude que nos supérieurs attendaient de nous, mais je savais me faire silencieuse en temps voulu.

L’obscurité de la nuit fini par prendre le dessus sur notre fougueuse jeunesse, et le sommeil ne se fit pas plus tarder.




La déchirure de la toile de tente me fit sursauter. La cheville durement empoignée, je fus traînée hors de mon abri en un éclair. Mon dos fut rappé à vif contre la roche humide et la terre et mon sang éclaboussaient en une traînée gluante ma nuque, imbibant ma chevelure de ce spongieux mélange.
J'essayais de m'agripper maladroitement au sol, et je vis ce qui me tenait si fermement la cheville. Une Trollesse, à la peau pâle et aux larges symboles rouge-vif. Elle dégageait une odeur pestilentielle. Son front, largement dégagé, et ses yeux d'un noir ébène lui donnaient cet air morbide et vide de toute empathie.

Elle se mit à rire, me crachant au visage, s'amusant peut-être de me voir nue comme un vers, traînant dans la boue en essayant d'échapper à sa prise, comme une bête apeurée. Entre quelques mouvements désespérés pour ramper vers la tente, la jambe durement tendue, je vis ce qu'il en était des miens. Tous furent pris de surprise pendant la nuit. Les Trolls de sang n'avaient aucun honneur. Notre ronde de nuit n'avait pas eu le temps de prévenir le camp. Jamais nous n’aurions pu croire qu'ils seraient aussi nombreux, peut-être deux à trois fois plus que notre bataillon.

Je perçu Ya'zir, roué de coups. Lui aussi n'avait pas d'autres armes que son corps et sa dignité. Je me souviens encore de son regard. Il me haïssait, subissant la colère de nos adversaires. Je voyais, entre quelques éclaboussures sanguinolentes, ses yeux. Ils me maudissaient. Chaque coups qu'il recevait était pour moi une honte grandissante. S'il n'avait pas pu se défendre, c'était entièrement de ma faute.

La Trollesse me souleva maladroitement, ligotant mes poignets boueux dans mon dos. Je sentais mes épaules forcées à l'extrême. Je me souviens encore du craquement osseux et de mes cris qui percèrent le son de leur tambours macabres. La corde se serra au creux de mon dos, mes épaules déboîtées et déformées par la posture soumise qu'elle m’infligeait. J'étais à leur merci, à la merci de nos assaillants.

Me redressant en tirant sur le cordage, ma vision se troublait. Une sueur lourde caressait mes tempes jusqu'aux commissures des lèvres. Au son des tam-tams et des grelots infernaux, j'avançais, la tête basse, en cherchant désespérément à savoir si Ya'sir était en vie. Ainsi, en file, nous avancions dans la nuit, et les cris stridents de nos suppléants et les coups forçaient notre marche à s'accélérer.

Mes jambes tremblaient, mes genoux grelottaient avec force, faisant de ma démarche une avancée bancale et douteuse. Chacun de mes pas menaçait de me faire chuter. Je sentais Yato'Sa contre mon dos. Elle était en vie. C'était tout ce qui m'importait à ce moment. Je la sentais s'avancer au point de marcher à mes côtés, s'assurant que je ne m'écroule pas et ralentissant la longue lignée que nous formions.
Son visage, aux quelques gracieuses rides, était marqué de bleu, un gros hématome violacé sur la pommette. Je me mordais la joue de colère, impuissante et honteuse. Je devais être bien pitoyable à regarder. Yato'Sa, elle, se tenait fière, le dos droit quand bien même l'une de ses défenses fut arrachée. Elle ne montrait rien de sa douleur, le regard fixant un point devant nous.

Alors que les lueurs flamboyantes de leur village perçaient les bois obscurs, je me redressais, essayant d'ignorer la fièvre montante et la douleur qui engourdissaient tout mon être. J'imitais tant bien que mal ma Mentor, essayant d'affronter ce jour nouveau qui promettait d'être particulièrement éprouvant.


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MessageSujet: Chapitre deux: Un jeu d'équilibre   Expédition de jeunesse Icon_minitimeMer 2 Oct 2019 - 0:22

Deuxième partie: Un jeu d'équilibre

J'ouvris les yeux aux premier rayons de soleil, ils caressaient la courbe de mon visage meurtri, marqué d'entailles et de bleus. Mes paupières étaient sèches, mes lèvres fripées par la soif, et mes jambes balançaient dans le vide. J'étais enfermée dans une cage suspendue, au dessus d'une terre qui s'abreuvait du sang que je perdais. Une odeur de tripes accompagnant la brume épaisse matinale me vint au nez. J'avais déjà rendu le contenu de mon estomac les premières nuits et ça devenait presque un exercice de convenance. La tête basculée en arrière, j'inspirais presque avec délectation ces odeurs. Elles me rappelaient que j'étais en vie. Mourante, mais en vie.

Ils nous avaient tous isolés. Les plus chanceux étaient en cage. Les autres, eux, ils avaient été crucifiés. Leur hémoglobine ruisselait en une traînée pourpre, servant d'offrande pour leur dieu. J'avais trouvé au fond de moi la force de régénérer mes épaules atrophiées. Le cordage coupé, j'étais libre de mes mouvements, dans un espace restreint, inconfortable et à l'hygiène particulièrement rebutante.

Quand ils ne nous faisaient pas danser jusqu'à l'épuisement sous les lancés de pierres et de pointes ensanglantées, nous devions les accompagner dans des tâches ingrates dont j'en tais le contenu par pudeur – ou par honte.

Du haut de mon perchoir je l'observais. Celle qui, de jour comme de nuit, me fixait avec une obsession malsaine. Ses pupilles sombres, deux billes fixes, essayaient de décrypter le moindre de mes gestes. La tentation de lui cracher dessus à chacun de ses passages était contenue par une douleur qui me prenait aux tripes. La peur. La peur des représailles.

Ce matin là, bercée par la brume pestilentielle, le grincement de la chaîne qui servait à suspendre mon logement éphémère me fit sursauter. Dans un tremblement tonitruant, je me voyais descendre. Mon cœur battait la chamade. Ceux qui posaient pied à terre hors des heures de travail ne revenaient jamais.

Le son grave des didgeridoos, le frottement des güiros et les claquements incessants des noix reprirent. Tambours battants, ils élevaient leurs cors. Ces barbares prenaient un malin plaisir à fêter une prise Zandalari si généreusement offerte. Je ne souhaitais que fuir ces sons incessant et porteurs de malheur. Mais j'étais encerclée par des corps pâles aux peintures sanguinolentes. Ma peau, qui rappelait l'océan nocturne étoilé, jurait drastiquement avec ces teintes agressives. Si je pleurais, je n'en avais pas conscience. Je suivais celle qui, de ses yeux noirs, avait pris gage de s'« occuper » de moi.

Nous traversâmes une passerelle bancale amenant à une haute hutte où m'attendait une petite assemblée d'une dizaine de ces sauvages. Elle se tenait au centre. Je l'aurais reconnue entre mille, la beauté pâle et épurée de Yato'Sa. Elle me tournait le dos, les mains liées par un cordage usé. Arrivée à niveau, un brouhaha incessant se fit. Chacun semblait crier sur son voisin. Je comprenais plus ou moins bien qu'ils pariaient quelques chose à notre égard, dans un Zandali haché et mal articulé.

L'un vint lui défaire ses liens. Lorsqu'il fit se retourner ma Mentor, agrippant sa tignasse blanc crème, je vis un fasciés vide de toute émotion. Ses iris étincelants n'étaient plus qu'une lueur à peine perceptible. Elle ne haussa même pas une arcade en me voyant. Sa peau était recouverte de peinture rouge qui imitait grossièrement les marques de nos dégénérés de bourreaux. Ils avaient osé. Ils avaient déguisé cette noble Zandalari, d'une caste haute et respectée, en une pâle copie d'eux. Tout désir de combattre nos assaillants s'était volatilisé en un instant. Je n'avais aucune idée de ce qu'ils lui avaient fait subir. Pour être honnête, je ne veulais rien savoir.

La pluie revint, battant contre la toiture et me ramenant à la réalité. Nous étions à présent côte à côte, traînées vers une plate-forme centrale juste au dessus d'un gouffre. Cette arène avait été conçue pour nous.

Les Trolls de sang ne montèrent pas dessus. Ils nous lâchèrent toutes les deux comme deux bêtes apeurées sur cette plate-forme tremblante. La pluie faisait des peintures forcées de mon alliée une coulée informe qui enlaidissait ses traits livides.

-LA MORT OU LA VIE, BATTEZ VOUS!!! POUR G'HUUN!!! Cria celle qui semblait nourrir une certaine obsession pour moi. Elle frappa alors de plein fouet un gong proche du terrain surélevé.
Elle annonçait leurs festivités, mais aussi, notre mise à mort.

Je me retournais vers Yato'Sa. Entraînée par la fureur de nos bourreaux et la peur au ventre, tremblante de la tête aux pieds, je donnais le premier coup. Un coup dans le ventre. Je voyais de près ma congénère recevoir le choc sans broncher. Elle m'observait, les yeux éteints, prête à recevoir mon désespoir de plein fouet. Le deuxième coup fut sur le visage. Je voulais qu'elle détourne le regard, que le remord parte, qu'elle cesse de me renvoyer en pleine face l'ignoble acte que j'étais forcée de commettre. Un coup de pied la fit s'écraser au sol. Je pensais gagner aussi facilement. Soudain, elle m'empoigna fermement le mollet, ni pour me faire chuter ni pour renverser la donne, mais pour se relever. Elle s'agrippa à moi. Celle que j'avais toujours admirée était là, à mes pieds, rampant en prenant ma carrure pour appui. Une fois à hauteur de mon visage, elle ne dit pas un mot, elle reprenait simplement sa respiration en avalant un surplus de sang.

Ma respiration s'accéléra. Je comprenais ce qu'il en était. Elle se sacrifiait pour moi, pour me laisser une chance, même infime, de m'en sortir. Alors, dans un cri désespéré, je l'empoigna avec fermeté. Je soulevais son corps en faisant contrepoids du mien. Je l’entraînais dans une course effrénée vers le vide. Cette étreinte dont j'avais tant rêvée me laissa un goût amer et salé. Au bord du gouffre, je la poussais une dernière fois. Et elle tomba. Jamais je n’oublierais cet instant. Cet instant où mon innocence chuta avec elle, où disparut celle que j'aimais le plus sur cette terre. Sa chevelure d'un blanc neige flottait, contournant ce visage poignant aux angles parfaits. J'aurai juré la voir sourire, une dernière fois. Une dernière fois avant que Bowsamdi ne l'emporte en bas du gouffre, désarticulant son corps dans un tas morbide d'entassements squelettiques, d'offrandes et de sacrifiés.

- RHAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAH!!!!!!!
Ma voix brisa le silence. Je ne l'avais pas remarqué jusqu'à présent mais plus un son n'animait les lieux. Mon corps s'éveilla tout seul. Une danse guerrière me venait du plus profond des tripes. Mes pieds frappaient le sol bancal de la plate-forme comme pour faire céder les attaches. Mes sauts et rotations menaçaient à chaque instant cet équilibre incertain. Ma natte battant les eaux pluvieuses, fouettant la cambrure de mon dos, m'infligeait cette douleur dont j'avais tant besoin. J'accueillis la folie à bras ouverts en me déhanchant dans l'espoir que ce supplice prenne fin. Ici et maintenant. Un large sourire naissait aux commissures de mes lèvres, dévoilant mes défenses et des dents avides de sang. Les yeux révulsés, les veines gonflant du bas des mâchoires aux clavicules, langue sortie, j'agressais de mon impertinence sauvage mes assaillants. Pas un ne s'approcha de la plate-forme. Ils  laissaient ma fureur dévorer mon être jusqu'à l'écroulement.
Une sensation d'une piqûre endolorit ma nuque, puis le noir complet.


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MessageSujet: Re: Expédition de jeunesse   Expédition de jeunesse Icon_minitimeDim 6 Oct 2019 - 22:39

Troisième partie: Bouclier de sang

Je m'éveillais péniblement. Une douleur me grignotait la nuque en une fourmillement constant. Mes doigts vinrent toucher une informe piqûre sur mon cou. J'avais été victime d'un tir de sarbacane, et la flèche avait été imprégnée d'un nectar – une odeur de camomille émanait de la zone infectée. Je pris aussitôt une tape sur la main et, en me redressant, surprise, je découvrais le lieu où on me gardait ainsi que la compagnie qui me surveillait. Une hutte, une multitudes de plantes et de grigris fixés ci et là, une chaudron rouillé, quelques dizaines de flacons et mixtures infâmes. Herboriste ou tortionnaire, le doute était encore présent jusqu'à ce que la troll de sang ne m'étale un baume sur toute la longueur du cou, me forçant à me rallonger d'une tape sur la tempe. On repassera pour la douceur ...

Je reconnus sans grande difficulté la peste aux yeux sombre qui ne cessait de s’intéresser à mon cas. J'en déduisit que j'étais une curiosité à ses yeux.

Une pointe étouffante s'empressa de me tordre boyaux et comprima mon cœur en un étau. Je sentais ma respiration s’accélérer et mon palpitant prêt à rompre. L'angoisse m'écrasait au sol, comme un boulet de fer massif et insupportablement lourd. On aurait dit que tout joie et tout sentiment positif s’envolaient le temps d'un battement de cil. Je voyais le visage de Yato'sa au dessus de moi. La fièvre monta aussi vite que les remords m'envahirent. Muscles crispés, tremblements et contractions incontrôlés. Tout mon être se cambra, une bave blanchâtre se déversa entre mes défenses, mes yeux remontaient dans leurs orbites. Je fus à peine consciente lorsque ce qui s’apparentait à une guérisseuse m'enfonça un bâton entre les dents pour empêcher ma langue de se retrousser dans ma gorge. Bien que douloureux, ce geste s'avérait nécessaire.

Ses mains rougies par le sang me maintenaient au sol. Elle plaça sa tête proche de la mienne et je pus l'entendre murmurer, dents serrées : « Qu'elle reste tranquille! » Mon corps s'écroula après quelques éternelles secondes cambré. Ma vue se troubla, je me souviens à peine m'être retournée sur le côté pour recracher le bâton et un vomis blanc. Dans mon délire, à moitié endormie, je pouvais entrevoir cette femme agiter grigris et encenses au-dessus de moi, imbibant le lieu d'une brume colorée. Elle baragouinait des prières envers son dieu, alors que mes pensées sombraient inexorablement avec le souvenir de Yato'sa.

-

À l'aube nouvelle, je me trouvais suspendue dans ma cage habituelle. Mon réveil fut causé par des cris incessants, ceux de deux personnes situées à quelques mètres sous mon abri de fortune. Je reconnus la voix de ma guérisseuse qui pestiférait contre l'un des siens. Quand bien même ils ne faisaient aucun effort pour articuler, j'arrivais à comprendre quelques mots, suffisamment pour me faire une idée de ce qui m'attendait. Elle braillait au sujet de cette flèche et du poison. Le geste avait été contre sa volonté. En somme, l'un d'eux avait sûrement mit fin au duel entre moi et ma mentor en comprenant l'évident sacrifice de mon aînée. Mais ça n'avait pas été au goût de tout le monde. L'homme rétorquait quelque chose de relativement agressif au sujet d'une mise à mort, d'une course, et de survie, qu'il laissait une dernière chance aux Zandalaris pour prouver qu'ils pouvaient rester servir G'Huun. Comme si c'était dans nos objectifs …

Je souriais de manière navrante en les écoutant. Que pouvaient-ils espérer de nous ? Des serviteurs loyaux et soumis jusqu'à la fin de nos jour ? Jamais. Je n'eût pas le temps d'éterniser ma réflexion que déjà la chaîne de ma cage vrombissait, annonçant la descente et le début d'une journée de plus en enfer.

Au sol, je fut entraînée à travers le village. Ma tête tournait et mon équilibre était incertain.
Il faut dire que le repos fut bref mais, aussi peu accueillante soit la hutte de cette peste, j'y serais bien restée une nuit de plus, juste de quoi reprendre des forces. Je marchais tête basse, prenant un coup de bâton au creux du dos dès que je rechignais à avancer. Croyez moi, à ce rythme on  a vite fait d’obéir sans broncher.

J'arrivais sous une toiture bancale qui m’amenait à une longue arène terreuse conçue en longueur. Une estrade de bois me surplombait, surchargée d'arc, de flèches ,de harpons et de tout ce qui pouvait servir à tuer à longue distance. Je rejoignis quatre autres trolls aux mains liées dans le dos. Je reconnus deux des éclaireurs de notre bataillon d'expédition et deux Trolls de sang visiblement reniés, condamnés au même sort que le notre. À la vue des ligne au sol qui séparaient le terrain en cinq longues lignes, sur trois cent mètre environs, je compris sans mal que nous allions courir. Mais pourquoi, pour qui et dans quel but ?

Lorsqu'une foule de trolls de sang s’agglutina sur les rambardes de côté, tout le long, je compris que le spectacle ne tarderait pas à les ravir. Une trolle, au bas mot trois fois comme moi, était assise au bout de cette course, en hauteur, dans un siège orné de crânes et de cornes qui annonçait assez aisément son rang parmi la troupe. Une Matriarche. Je la maudissais du regard, jusqu'à ce qu'une voix familière m'interpelle.

En me retournant, je reconnus, avec stupeur, Ya'zir. Il était en haut, accompagné de quatre autre trolls Zandalari de notre bataillon. Tous empoignèrent flèches et arcs. Mes yeux s’écarquillaient à cette vision. Alors quoi ? Nous allions nous faire chasser par notre propres semblables ? Le vice allait jusque là ?

Les cinq tireurs se mirent en positions. À la vue de leurs multiples blessures, je compris bien vite qu'ils n'avait pas autant souffert que nous ici-bas. Je vis au regard de Ya'zir que tout espoir était vain. Pire encore, il n’eût aucune hésitation à bander son arc en m'observant fixement, sans sourciller.

La troll aux yeux sombres, qui jusqu'à présent avait fait en sorte de me maintenir en vie, s'approcha pour défaire mes liens. Quatre autres de ses congénères firent de même pour mes acolytes. Je crus voir de la pitié dans ses iris sombres. Que cette vision soit du fantasme ou le fruit de mon imagination désespérée, je voulus croire un brève instant que je n'étais pas seule.

« Qu'elle se batte, la sortie, elle existe pas. » Murmura-t-elle. Ses lèvres blanches et rouge s'animaient juste à quelques centimètres de moi. Je l'observais, incrédule, avant qu'elle ne me pousse vers ma ligne de course. Le gong sonna le commencement de cette épreuve sordide. Je m'élançais aussitôt dans une course acharnée, la terre molle éclaboussant jusqu'à hauteur de cuisses. Nous avancions côte à côte. Nos souffles s'épuisant les dix premiers mètres parcourus, je vis, dans un mouvement désarticulé, l'un des éclaireurs s'écraser dans la boue, ses jambes passant au dessus de son dos en un roulé-boulé sanglant. La flèche qui percuta son dos se brisa dans la chute, arrachant un cri de torpeur au coureur.  

J'eus le stupide réflexe de freiner ma course, essayant de m'écarter de ma ligne pour le rejoindre, mais une flèche me passa juste sous le nez. Je sentis le vent souffler derrière son plumage écarlate avant qu'elle ne se plante durement dans le sol. Par instinct je cherchai qui tirait et vis Ya'zir bander de nouveau son arc, puis tirer une nouvelle fois dans ma direction.

Les flèches fusèrent tout autour de moi. J'entendais les bouts de fer se planter dans le bois des estrades et dans la terre, l'une frôlant de peu mon talon. Le second troll à terre ne se fit pastarder : l'un des deux trolls de sang condamnés s'était écrasé lourdement contre la rambarde qui nous séparait du public. Ses cris d'agonie accompagnèrent notre course vers la Matriarche.

Voyant que mon semblable n'arrivait plus à suivre, je me jetai sur le dernier troll de sang en course. Il fut aussi surpris que notre public et un duel collé-serré débuta. Je l'écrasai contre la rambarde, frappant sa tempe pour espérer l’assommer au plus vite. Le coup de pied qu'il m'infligea dans le thorax me propulsa au sol. En roulant en arrière je pus me relever à temps, esquivant un des tirs meurtriers. Mon congénère, lui, courait toujours, suppliant la Matriarche à l'autre bout de faire cesser tout ça.

Je fusillais du regard Ya'zir et son arc. D'une rage incontrôlée, j’empoignai par le col le troll de sang pour le positionner devant moi, tel un bouclier face aux tirs. La foule fut prise de joie à nous voir lutter pour survire, ou alors fêtaient-ils la victoire de mon confrère … Après tout, il allait être le premier arrivé et pour sûr j'avais déjà perdu. Comme ma mentor, j'aurais offert bien volontiers ma place.

J'avançais vers les tireurs, rebroussant chemin. Le corps du troll de sang vibrait et basculait d'un côté comme de l'autre à chaque tir juste. Rien n'aurait pu m'arrêter. J'avançais encore et toujours, me protégeant des archers derrière sa chair encore tiède. Il était lourd et ma force considérablement amoindrie.

J'entendis la foule éclater d'une joie sanguinaire pour une raison qui, sur l'instant, m’échappait complètement. Je regardai alors par-dessus mon épaule et compris sans difficulté l'horreur de ce jeu. Que ce soit devant, derrière, au commencement ou à l'arrivée : aucune issue n'était possible. Nous étions tous voués à mourir. La Matriarche, du haut de son siège, vint empaler l'éclaireur d'un seul tir de harpon. Le corps de mon confrère bascula en arrière, s'empalant de plus belle, l'arme plantée dans le thorax. Je le vie s'écraser peu à peu sur la longueur de l'arme, maculant de pourpre le harpon de la lame jusqu'au manche. La tête basculée en arrière, je pouvais voir d'ici s'éteindre la lueur de ses iris en un dernier souffle.

Je m'écroulai sous le poids de l'échec. Le corps du troll de sang s'effondrant sur mes épaules, je le maintenais pour supporter les derniers tirs. Je voulais résister autant de temps que possible. Juste assez pour voir ce salopard de Ya'zir crever sous les coups de nos assaillants. Je voulais le voir se briser! Traître!

Un cor assourdissant domina la cohue générale et tambours et autres instruments festifs se turent. Tous levaient la tête, à l'écoute, attentifs. Les tireurs se stoppèrent. Un silence de mort s'installa. Seul le tremblement de la terre m'indiqua que mon heure n'était pas encore venue. Un vent de panique fit de cette troupe festive une bande de chialeurs, courant dans tous les sens pour fuir les estrades et se ruer vers le centre de leur village. J’entendis les galops et grognements des fauves, le hurlement des loups et le cor de guerre qui, de nouveau, brisa le silence.


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MessageSujet: Re: Expédition de jeunesse   Expédition de jeunesse Icon_minitimeSam 19 Oct 2019 - 2:09

Quatrième partie: La charge

Le fracas tonitruant des remparts boisés cédant sous le poids de la cavalerie annonçait le début des hostilités. Le son assourdissant des cors me fit me recroqueviller à terre contre la dépouille du troll dont je m'étais servi comme bouclier pour survivre. Jamais je n'avais entendu un tel chant. Il était à la fois grave et profond sans avoir ni la grâce ni la souplesse des cors zandalaris. Il était agressif et annonçait une puissante violence dont je ne mesurais pas, à ce moment là, l'étendue ...

L'agitation à l'entrée et les cris des locaux me parvinrent aux oreilles sans attendre. La cohue provoqua un bouleversement : une assemblée de trolls fuyards se fit broyer et les remparts en bois écrasaient sous leur poids mes semblables en les étouffant dans une terre molle et boueuse. Les sons des corps s’apaisèrent, et je me relevais tandis que s'élevaient des cris de guerre et des hurlements sauvages qui annonçaient le raid. Incrédule, j’aperçus alors, en levant les yeux, au loin, l'extérieur de l'arène.

D'épais cavaliers, dont la peau verte étaient teintée de gris, chevauchaient d'immenses loups qui galopaient à grande vitesse dans tout le camp. Certaines de leurs victimes succombèrent après avoir été écrasées par les bêtes, d'autres expiraient un dernier souffle en se faisant sauvagement faucher en pleine course par des armes massives, cloutées et ferrailleuses. Je reconnus alors les assaillants : c'étaient des Orcs. On m'avait instruit à leur sujet, à les identifier – notamment à l'aide de leur morphologie particulière – mais je fus tout de même surprise par leur carrure. Dans leurs yeux s'animait une rage furibonde qui leur donnait l'air d'être déments. Je reconnus parmi eux un bataillon de réprouvés qui chevauchaient des montures équestres aux corps putrides délabrés et aux crinières ensanglantées qui battaient sous le vent. Leurs armes dressées au devant étripaient avec adresse les Trolls qui avaient réussi à fuir, un court instant, les premiers assauts militaires.

L'espoir resurgit ! Mes sauveurs étaient arrivés !

Les premiers boulets de canon ne mirent pas longtemps avant de s'écraser sur les structures en bois, les faisant éclater et s'écrouler en une multitude de dépris et de morceaux prêts à transpercer ceux qui avaient le malheur de s'en approcher. En me précipitant vers l'entrée de l'arène je fus témoin de la course folle de cette inattendue cavalerie. C'était la Horde, du moins qu'un infime bataillon de cette immense armée nichée au-delà des mers salées. Et pourtant, jamais je n'aurais cru voir une si puissante cavalerie. Ils balayaient leurs ennemis en seulement quelques mouvements de leurs armes.

Les drapeaux rouge étaient levés haut et fièrement à l'arrière des caparaçons de ces loups avides de sang, montés par leurs guerriers qui se ruaient sur les trolls de sang combattants. La cavalerie de réprouvés allait à grande vitesse en direction de l'arène et de ses alentours, dirigée par l'une des leurs. Elle semblait assurée. Aucun d'entre eux n'avait peur d'aller de l'avant et leurs montures osseuses accéléraient toujours plus vite parmi les trolls en les décimant les uns après les autres.

Je vis Ya'zir descendre à toute vitesse des rambarde de bois de l'arène, courant en direction du bataillon, les bras levés. À cet instant je n'avais plus aucune rancune envers lui. Il avait fait tout ça pour survivre, tout comme moi. Nous n'étions rien d'autre que des victimes. Il m'en voudra sûrement pour Yato'sa, mais nous n'en étions pas là … Il était désireux d'intercepter nos sauveurs. Les-mêmes qui, quelques heures plus tard, auraient finit de mettre à cendre le camp.

Le tranchant de la hallebarde de la réprouvée se planta dans le buste de Ya'zir et le temps se figea l'espace de quelques secondes. J’entendais d'ici la fracture osseuse qu'elle fit subir à mon confrère. Le bout de l'arme surgissant dans le dos de Ya'zir le traînait violemment sur plusieurs mètres dans une longue traînée de boue et de sang. Je clignais des yeux plusieurs fois, essayant de réaliser ce qui venait d'arriver. Nous n'étions pas des trolls de sang ! C'était injuste et ça n'avait aucun sens!

La chute dans l'arène d'un boulet de canon, englobé d'un feu grégeois intense, ne me laissa pas le temps pour m’apitoyer. En une fraction de seconde les flammes commencèrent à dévorer les structures en bois, les rambardes et les cadavres du jeu futile dont j'avais subi l'humour douteux.

Je me mis à courir aussi vite que mes jambes le purent, les yeux écarquillés. J'étais terrifiée. Terrifiée à l'idée d'être écrasée comme les autres trolls. Je glissais, j'enjambais, je sautais au-dessus des corps et des membres, et finis par débouler dans une fosse où la plupart hurlaient de douleur. Ils avaient les tripes à l'air libre, les mâchoires disloquées et les cervelets glissant hors de leur cavités respectives. J'aurais donné n'importe quoi pour n'être jamais née en cet instant si lugubre …

Le vrombissement des cors reprit. En me retournant je vis que le bataillon des réprouvés se divisait en cinq groupuscules, s'éparpillant dans le camp pour pourchasser les rescapés. C'est là que je la vis, cette réprouvée aux dagues tranchantes. Ses yeux éclatants d'une lueur solaire me fixèrent et elle tira sur les brides de sa monture, se détachant de son groupe. Au galop, elle entreprit ma poursuite en empoignant une lance. Elle me fixait, traversant et écrasant les membres trolls sous les sabots couverts de rouge de sa bête. Les battement de mon cœur vibrèrent jusqu'à mes tympans. Je déglutis à cette vision avant de prendre la fuite, détalant comme ces trolls de sang qui de toujours étaient mes ennemis.

Alors c'était ainsi. Un troll reste un troll, qu'il soit de sang, vénérant quelques immondices, ou qu'il soit de lignée Zandalari, prisonnier. Ils ne firent pas la différence, supposant peut-être que j'étais des leurs. Mais Ya'zir alors? …

Chaque pas était pour moi une torture. J'étais drastiquement affaiblie, mentalement, physiquement … La Horde allait mettre fin à mes souffrances en cherchant à m'embrocher comme un animal apeuré. Une fin médiocre. Je comprenais pourquoi Gonk n'avait jamais écouté mes plaintes et mon désir d'être l'une de ses suivantes. Je n'en étais tout simplement pas digne.

Tout espoir était vain et je finis par m'écrouler, genoux à terre. Jamais je n'aurais eu le temps de me mettre à l'abri. Jamais je n'aurais pu espérer de l'aide … Je ne pouvais compter que sur moi, et ça n'en valait plus la peine.


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Mon regard se perdait dans la pluie naissante, faisant du sol une matière spongieuse où les corps glissaient les uns contre les autres. J’entendis le galop assourdissant de mon bourreau se rapprocher. Mètre après mètre. Les secondes s'écoulèrent. Bowsamdi finirait par m'étreindre. Quelques chose m’interpellait dans l'obscurité des débris. Deux yeux sombres larmoyant, terrorisés. Mes arcades se froncèrent à cette vision. La troll, celle qui fut éphémèrement ma soigneuse, était à l'état de larve tremblante, le visage couvert de sang, celui des siens. Elle me fixait, en position fœtale, ses dents claquant d'un tremblement incontrôlé. Elle n'était pas si différente de moi. Nous nous haïssions pour nos idéaux et pratiques opposés, mais aujourd'hui nos origines étaient les mêmes. Notre visage, nos membres étaient similaires. J'étais Trollesse, avant d'être Zandalari, et elle était aussi Trolesse. Je n'affirme pas avoir la science infuse, mais ce soir là, à ce moment précis, je nous vis toutes deux comme des égales face à cette implacable menace.

Je ne sais qu'elle force m’anima, mais, un pied après l'autre, je me redressais. Mon corps tremblait d'une fougue que je n'avais encore jamais connue, une force grimpant à travers mes veines pour imploser en une fureur rivalisant avec celle de mes adversaires.  Un flux puissant virevolta tout autour de moi. Ma cambrure naturelle se brisa, mes cotes s'élargirent, une lignée osseuse m'arracha la peau du dos pour former une longue ligne épineuse de ma nuque au bas du dos, celui-ci s'allongeant en une queue massive. Mes mains se broyaient en reformant de larges pattes aux griffes acérées. Je retombais à terre, sentant mes jambes se casser en deux informes pattes animales. Les Loas avaient entendu mon appel. Ma détresse avait enfin trouvé une oreille.

Le hurlement que je poussais était un rugissement assourdissant, si puissant qu'il freina la cavalière qui tira trop brusquement sur les brides de sa bête et elle finit par s'écrouler au sol en tombant de sa selle dans un fracas osseux peu reluisant. Ma vision était encore trouble et, tel un enfant venant de naître, ma lourde patte se posa sur le thorax de la réprouvée. Je sentis ses côtes se creuser sous le poids de ma carrure, son buste ramollissant avant de sombrer dans un sourd craquement. Ses yeux flamboyants me fixaient avant de s'éteindre sous cette pluie abondante. L'eau perlant le long de mes écailles nouvellement poussées, je ne pu retenir l’appétit de Gonk. Lorsque mes dents acérées se posèrent contre le crâne de mon adversaire j’entendis sa tête se broyer sous mes coups de mâchoires. Je savourais avec délectation le prix immonde de ma victoire.

Redressant ma gueule reptilienne, à demi-consciente de mes faits et gestes, je mesurais avec peine l’étendue des dégâts : ceux du camp, ceux de la Horde … Et les miens, profondément enfouis en mon être meurtri. Il aurait était plus brave d'aller au combat, mais mon instinct primaire me força à la survie. Je me retournais donc vers la Troll de sang qui me regardait à présent avec une crainte non-voilée, terrifiée à l'idée que je ne la dévore à son tour. Je m'approchais, d'une gestuelle souple évoquant avec qu'elle facilité je pourrais prendre l'avantage de la vitesse contre à peu près tout animal terrestre connu. L'enivrante bestialité dont je profitais s'estompa aussi vite qu'elle était venue, me faisant m'écrouler aux pieds de la Troll de sang. Mon corps reprit peu à peu sa forme allongée habituelle. Je repris aussi difficilement mes esprits car l'envie de me retourner pour constater le résultat me démangeait. Cependant, j’eus le reflex sordide d'empoigner ma congénère par le bras pour la tirer violemment avec moi, la giflant pour la ramener à la réalité des choses.

Elle sursauta au geste, avant que je ne la tire à travers les débris et les flammes de l'arène non loin de nous. Dans cette cohue macabre, nous avions une chance de nous en sortir. Il fallait la tenter.


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MessageSujet: Chapitre cinq   Expédition de jeunesse Icon_minitimeSam 19 Oct 2019 - 19:31

Cinquième partie: Loa...

Ma main au creux de la sienne, plus rugueuse et sèche. Nous traversions les amas de corps et crevasses boueuses, tirant l'une lorsque l'autre faiblissait. Il n'y avait rien à dire, nous nous suivions comme deux bêtes effrayées, dans l'unique espoir de fuir cet enfer, qui même pour une adoratrice de G'huun, dépassait de loin ses capacités.

J'avais le réflexe de toujours regarder de tous côtés, m'abaissant lorsque la silhouette d'un orc, ou grognement de loups se faisait entendre. Dos voûtés, nous avancions à l’aveuglette, la brume montante et odorante nous camouflait un tant soit peu. Suffisamment pour ne pas se faire remarquer.

Elle me cogna l'épaule, comme pour m'avertir de quelque chose, je sursautais presque à son intervention. Avant d'en comprendre le sens. Les chauves-souris. Elle pointait du doigt l'armature boisée qui maintenait encore quelques unes de ces bêtes, capables de supporter le poids d'une de nous, avec de la chance, peut-être les deux. Il fallait le tenter, à dos de bête, nous aurions plus de chances de nous mettre rapidement à l’abri et s'éloigner de ce génocide.

Je me précipitais vers cet écurie suspendu, croisant les mains, genoux pliés, je lui ferais la courte échelle. Je voyais dans ses yeux sombres le trouble à mes agissements, c'est un fait, jamais un Zandalari ne prendrait la peine de sauver son ennemi de toujours. Mais pas moi, j’insistais, fronçant les arcades, la suppliant en silence de se presser.
Ce qu'elle fit.

Son pied entre mes mains je la propulsais sur la bête, m'assurant qu'elle puisse la chevaucher. Presque aussitôt, et j'en fus rassurée, elle me tendit la main, le postérieur installé sur la selle de fortune, et les bras fort tendus vers moi. J'empoignais sa main alors que déjà, elle détachait les brides de la créature, prête à nous emporter vers des horizons verdoyants.
Je souriais à cette vision paradisiaque, une détonation brisa soudain le silence, m'arrachant à mes rêves de liberté.
Une douleur indescriptible me frappa le bras, celui-ci se disloquant et s’arrachant quelques centimètres avant mon coude. Je voyais les yeux sombres de mon acolyte s'écarquiller, elle tenait fermement mon bras arraché à mon corps, des lambeaux de chair nous éclaboussant dans une nuée humide et sanguinolente. La deuxième détonation fut fatale, j'eus à peine le temps de réaliser que mon visage prenait feu, une chaleur dévorant ma basse mâchoire qui au choc éclata en plusieurs fragments osseux. Ma vision du côté droit disparut en un claquement de doigts, le bruit sourd et caverneux de son cri me paraissait si éloigné, avant que le noir n'envahisse tout mon être.
Le silence et la mort.  
_

Légèreté, splendeur, telle chimère s’évaporant aux gré des songes, je laissais mon être glisser dans ce gouffre de savoir et de bienveillance. La peur m'était alors inconnue, le trouble dissipé et la souffrance plus qu'un lointain souvenir fade et sans saveur.

Les couleurs aux éclats de blanc m'offraient un cocon chaleureux, m'englobant dans cette matière sans substance, un liquide aux moiteurs indescriptibles. Chaudes et réconfortantes.

L'impression de flotter au dessus de tout, de moi même et du reste matériel, souvenirs fragmentés qui semblaient s’émietter au fil du temps, quand bien même le temps ici n'a plus d'importance.

Je n'avais ni yeux ni nez pour sentir ou voir, chaque prisme incolores perceptibles de sens, sujet à la fascination pure et non à la logique.

Le rire de l'enfance submergeait mon être tout entier, comme une émotion palpable et lointaine, tremblant de part et d'autre de ce globe sans fin. Le tourbillon de la jeunesse et l'épanouissement de l'âge adulte, faisant vibrer tout cet espace sans fin.

Le tourbillon de sentiments et de bien-être se fit plus présent encore, comme si, en prenant de l'âge, je trouvais l'incompréhension de l’enfance, naturellement décryptée. Plus aisé il était de lire entre les lignes.

Je sentais son aura, omnipotente, omniprésente. Colossale et prédominant tout ce capharnaüm de plaisir. Sa large stature, aussi haute que les montagnes, aussi fort que la roche et le fer. Ses défenses plus épaisses qu'aucun d'entre nous ne saurait en avoir, plus longues de trois bâtisses, plus solides que l'acier lui-même, gravées dans l'ivoire de milles et une histoires. Son visage ne m'est pas perceptible, lointain souvenir ou vague illusion éphémère, le retranscrire est chose vaine. Il est ici et ailleurs, surplombant les océans nuageux et éblouissant cette terre à la texture inexistante.

Sa voix raisonnait en moi, tel un murmure vrombissant de plénitude. Me ramenant doucement dans un état second, celui de la vie. Les battements de mon cœur reprirent lentement leur rythme, je me retrouvais sous la pluie moite et désagréablement collante. Les odeurs charnières non loin, le souffre, la cendre et les flammes agressant mon conduit nasal. Mon œil encore à peine valide, laissait s'écouler de longues et lourdes larmes. Ô je n'étais pas triste, je souffrais, comme jamais je n'avais souffert. Mais la force de cette chimère fantasque au creux de mes songes, protégeait mon esprit et mon corps, de ne pas me laisser aller vers les sombres portes de Bwonsamdi.

Je ne saurais retranscrire ses paroles, elles sont miennes, secrètement enfouies en moi, là où, même ma mémoire défaille. Je restais là assise, n'ayant ni la force de me relever, n'étant ni complètement consciente. Je laissais faire le temps, mon corps inerte attendrait que sous cette pluie torrentielle, la vie me revienne. Qu'il m'offre une deuxième chance.
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à suivre...


Dernière édition par Bene'Zia le Dim 20 Oct 2019 - 17:39, édité 3 fois
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MessageSujet: Re: Expédition de jeunesse   Expédition de jeunesse Icon_minitimeDim 20 Oct 2019 - 17:32

Sixième partie: L'aube nouvelle...

La froideur de cette pluie incessante n'atteignait même plus mes sens. L'humidité abondante et moite remontant le long de mes mollets, Nazmir était et sera toujours une région pluvieuse, particulièrement riche de sa flore locale. Les restants de braises et de cendres compactes dégoulinaient sous mes yeux, contournant mon corps immobile. Je voyais entre mes paupières mi-closes de mon œil valide, les luisances de cette terre mouvante.

Le battement de mon cœur était si lent et sourd à mon oreille, que j'ignorais à l'instant, si la vie m'était encore accordée. Comme enfermée dans une boite sombre, et je n'avais que ça à faire, j'écoutais la pluie battre contre les toitures et structures démolies par la Horde. Comme je fus bien sotte de croire en mes sauveurs. Ces monstrueux bourreaux venue d'au-delà des mers. Qu'ils y retournent ! Mieux encore qu'ils y périssent !

Mon visage, ce qu'il en restait, se tordit de colère, les quelques lambeaux de chair ornant ma gorge laissaient pendre ma langue comme un vulgaire morceau de viande, se contractant à plusieurs reprises, m'étouffant dans ma rage. Si je ne me calmais pas, je finirais par m'étrangler toute seule. C'est avec courage et une logique bien terre à terre, que je m’efforçais de reprendre mes esprits. Avalant et déglutissant lentement, pour permettre à mes chairs de se renouer à leur rythme.

Que cela se compte en heure ou en jour, mon ventre déjà en famine, grondait de frustration. L’appétit grandissant et le besoin de manger se faisaient plus pressant encore. Sans parler de cette terre mouvant par les flots locaux, qui finirait par m’entraîner dans un torrent de boue et d'excréments. Je savais que si je tombais sur le ventre, s'en serait fini de moi. Je n'aurais ni la force de me redresser, ni celle de recracher ces kilos de boue noyant mon organisme. Il fallait que je reste droite, totalement rigide. J'étais vulnérable, et le moindre restant de cadavre en putréfaction me frôlant ne faisait qu’aggraver le risque de sursaut incontrôlé.

La nuit s'en revient, refroidissant drastiquement mon épiderme en guérison. Le matin sec soulageait mes tourments nocturnes, et de nouveau la froideur glaçait mes entrailles. J'épargne les détails trop lugubres de ma régénération, les rejets du corps et les conditions navrantes que mon être devait subir pour rester en une telle posture. Pour sûr, les miens ne me reconnaîtraient pas, me disais-je lorsque mon esprit était des plus lucide. Entre folie et rêves absurdes, je pensais à Yato'sa. Comment pouvions nous en être arrivées là, sortie de nos retranchements d'or et d'argent, sous la coupe divine de notre Roi. Je me souvenais presque de son rire rassurant, sa voix rocailleuse avait ce petit quelque chose de communicatif. Il était impossible de ne pas partager sa joie lorsqu'elle s'exprimait. Belle et charismatique.

Plus je pensais à mon mentor, plus ses traits s'évaporaient, déformant son faciès en un visage plus fin, plus âgé aussi. Marqué par le temps et les connaissances. Quelques fines fissures naissantes aux lèvres, les paupières marquées de quelques rayures gracieuses. Je fronçais mes arcades, mon globe oculaire mou et ramolli se gonflant de sa texture limpide habituelle, la vue me revient au fur et à mesure que j'essayais de percevoir ce songe mi-réel. Voilée dans l'obscurité nocturne. Je n'étais plus vraiment en état d'avoir peur de quoi que ce soit, j'étais simplement spectatrice de cette vision.

Sa silhouette maigrichonne, sa peau claire et son air bienveillant, me faisais presque sourire. J'eus un sursaut de torpeur avant de réaliser que mon bras s'était presque remis, os et fibres musculaires renaissant à leur tour. Je me redressait, mes jambes crispées de fourmillements et de douleur, l'eau et la terre molle avaient fripés mes jambes, elles mettraient un certain temps à se remettre de cet état larvaire dont j'étais la victime.


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Info RP Exclamation"esquisse trouvable dans un carnet de cuir, caché dans le sac de Bene'Zia, à moins d'être un voleur..."



Je me tenais plus ou moins droite, m'adossant au premier tas de cadavres ramollis et imbibés d'eau et de souffre collant, pour observer mon aînée.

Je voulus me précipiter sur elle, comme pour enlacer ce visage bienveillant dont j'avais tant besoin. M’élançant bêtement vers la spectrale illusion, mes bras enveloppant sa taille translucide, je m'écroulais minablement dans une flaque spongieuse, me rappelant dans quelle sordide situation je me trouvais. Seule, isolée de tout, éloignée des miens, affamée, anéantie.
Les dons de Gonk eux même n'étaient pas arrivés à me sortir de là. Seul cet étrange vision... Je me crispais aux souvenirs défragmentés de ce rêve sans logique, autre que la fascination. Une voix grave à peine perceptible, pourtant, me murmurait des choses. Je réalisais avec éffroi que cette même voix m'avait accompagnée durant toute cette phase inerte. La décrire serait chose vaine, mais j'étais certaine d'une manière ou d'une autre, que si mon corps se rétablissait aussi vite, c'était grâce à cette chose sans visage cachée dans les creux les plus illogiques de ma conscience.

Me redressant, le sourire réconfortant avait disparu, la Trollesse évaporée à mon geste si stupide. Je voulus pleurer la perte de cet infime espoir, mais la réalité me rattrapa bien assez vite. Une bête ailée survolait cet immense cimetière en décrépitude. J'eu le réflexe naturel de courber l'échine, la peur au ventre, en voyant cette créature descendre en pic vers moi.

Elle se posa à quelques mètres de moi, éclaboussant d'un mouvement d'aile les quelques membres odorants et imbibés d'eaux souillées. En redressant la tête, mon cœur se serra à la vue de ses yeux d'un noir absolu. Si ce n'était pas un rêve, la trollesse de sang avait survécu à notre fuite désespérée.

Je n'eu pas le temps de calculer les potentielles options qui s'offraient à moi, elle descendit de la selle, se précipitant dans ma direction pour empoigner mon bras valide et me tirer avec elle sur sa bête.  Aucun de mes confrères ne croiraient ça à mon retour à Dazar'alor... Ou, ne voudraient t-ils pas l’entendre plutôt.

Je m'agrippais tant bien que mal à la selle, manquant de tomber à la renverse lorsque d'un large battement d'ailes nous quittâmes le sol. Je réalisais que l'aube se levait, au dessus des grands arbres de Nazmir, qui offraient un horizon verdoyant de leurs feuillages resplendissants. Je ne savais pas franchement où nous allions, et je me fichais de le savoir. Tout ce qui m’importais était de fuir cet endroit. L'air était frais, mes conduits nasaux restaurés, je pouvais enfin humer avec délectation les saveurs de cette liberté nouvellement acquise. Mes bras noués à la taille de ma congénère, je souriais à l'entendre rechigner au sujet de mon odeur et de mon bras sanguinolent collant.

Même dans cet état, elle trouverait le moyen de me dire que je suis laide, puante et péniblement lourde pour sa monture...


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Premier cycle clos. à Suivre "l'âge d'Or".
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