Héritiers du makoa loa

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 Le Vi'griot

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Trik'we

Trik'we


Rôle : Parle-Esprit

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MessageSujet: Le Vi'griot   Le Vi'griot Icon_minitimeMar 18 Mai 2021 - 14:05

Trouver le tout-droit
sous ses pieds
Trik’we reconnait rapidement l’amulette à tête de serpent taillée dans du vieux bois noirci par les intempéries. Il la revoit léviter entre les flammes bleutées au cœur du rituel orchestré par les mains levées de Mwan’ga. Le frère drakkari la happe vivement en énonçant Kalimdor de sa voix grave. Il connait leur position. Ce grigri tourne ses yeux reptiliens dans leur direction comme une boussole pointe le nord à ne pas perdre. Un danger contre lequel ses visions partagées l’ont alerté. Et actuellement, ce danger est serré entre les énormes doigts du troll redoutable. Celui que le lac vient de recracher sur la rive. Il s’ébroue, désarçonnant la trollesse à crête brune sur son dos qui gronde son mécontentement. L’autre drakkari qui les accompagne, les traits plus marqués par l’âge, essore les pans de sa robe de féticheur. Il lève une main apaisante à l’intension du jeune chevaucheur se redressant.

« Ils font que passer. Qu'il continue à faire ce qu'il faisait », dit-il.

Trik’we est maintenant si familier à ses visions, elles sont devenues sa propre mémoire. Il se souvient de son visage comme s’il était son propre fils. Akili. Et le colosse, c’est le petit Zo’kar. La trollesse il ne la connait pas. Pas encore. Il comprend qu’il est face à deux enfants d’Uon’go et son sang se glace, figé par ce déferlement de problèmes venu du Norfendre.

« Ils continuent le chemin. Le temps, ça se rattrape pas Zo'kar ! » rouscaille Akili.
« Mrrrh. Toute façon c'est toujours Zo'kar il doit tout faire... » rétorque le géant tout en baissant son crâne démesuré pour consulter la tête de serpent. La trollesse relève le menton.
« C'est toujours Zo'kar il se plaint, oui. »
« Hééé hoho, elle veut le faire à la place de Zo'kar ? »
« Donne. »
Elle tend la main et celle du troll redoutable se ferme en un poing contrarié pour percuter le sol.
« Non ! C'est Zo'kar qui fait. »
« Seyolo ! Qu'elle laisse le temps à Zo'kar d’apprendre, d'accord ? »

Le zandalari fait signe à Métti d’approcher et elle se glisse d’un pas prudent à ses côtés.
« Qui sont-ils ? » murmure-t-elle.
Il se penche pour répondre à son interrogation sans lâcher le trio du regard.
« La famille de Shai'ri. L’amulette, c’est celle dont je parlais. Celle qui les aide à la pister. »

La drakkari est toujours plongée dans le coma, cachée dans la brousse prospérant entre deux arbres. Le chevaucheur ne veut pas attirer l’attention sur la position de l’âme endormie mais il doit se rendre à l’évidence : la confrontation est inévitable dans les conditions présentes. Il est parvenu à soulever Jum’sha et à le basculer par-dessus son épaule pour prouver sa résilience au scalp-rouge quelques jours plus tôt, mais son corps se souvient encore de l’abattement soudain qui lui vida les muscles de tout mouvement l’instant d’après. La rituel raté d’Ebusi’khan et les rêves délirants dont il a hérité lui ont siphonné tout le mojo. Ils n’avaient ni le nombre, ni la condition physique pour prendre le dessus. La seule solution était de décamper d’ici avant que les trolls des glaces ne se rendent compte de quoi que ce soit. Par chance, le petit Zo’kar a du mal à déchiffrer les indications sifflées par le reptile en bois. Il se gratte la tête avec un air perplexe.

« Et bien quoi ? Qu'il reste pas planté là, on avance ! »
Le colosse pivote lourdement vers les deux Héritiers et la platitude du lac derrière.
« En fait le tout-droit c'est par là-bas. »
« Ca, ils en viennent Zo'kar ! »
« Ou là-bas... dit-il en pointant la direction de Shai’ri juste avant de s’énerver un peu. Grmrmr.. L'est cassée l'amulette ! »
« ... Le Zo’kar sait pas lire l’amulette ! » s’exclame la brune.
« Bah elle a qu'à la lire, elle ! » renâcle le redoutable.
« Donne déjà, la Seyolo elle lit mieux que toi ! »
Sa fierté confuse le perd dans ses affirmations et il menace à nouveau les Tarides avec son immense poing.
« Non ! On a dit c'est Zo'kar il décide ! Y va trouver le tout-droit tout seul. » bougonne-t-il en bousculant la drakkari pour s’avancer du pas imprécis des voyageurs sans carte.

Le zandalari se tourne vers la trollesse de Vol’dun et lui promet de les suivre de près. Elle acquiesce et file rejoindre Iko à qui elle fait discrètement signe de se préparer à partir en vitesse. Trik’we sourit au géant s’approchant. Il sera la diversion nécessaire à la retraite du reste du groupe. Le redoutable plante ses imposants talons à quelques centimètres de lui.
« Faut se pousser, Zo'kar il doit passer. »
« Vrai qu'il prend de la place, eh. Certains diraient qu'il est pas mal gros. Mais par-là, continue-t-il en désignant d’un geste les vastes espaces brûlés par le soleil, il devrait avoir de quoi le contourner, pas vrai ? »
Le gentil benêt grogne comme une bête et reprend sa marche en passant sur le côté. Akili tourne son expression placide vers le jeunot et ce qu’il imagine être son agacement.
« Ils sont juste de passage. Mais le Zo'kar, il apprend, alors il faut être patient. »
Trik’we allait lui répondre, mais le cercle dessiné par les pas de géant autour de lui arrondissent son regard. Dans la main du redoutable, il peut apercevoir le grigri convulser. Il se souvient d’une autre vision de Mwan’ga. De son sourire satisfait lorsqu’il déclare : « Si on le trouve lui, on la trouve elle. »

Trik’we pâlit. Métti est loin à présent, mais le serpent de bois ne pointait pas en direction de Shai’ri. Il serre ses doigts pour étrangler le maudit mojo gelé d’Uon’go qui court dans les veines de ses bras jusqu’au niveau de ses coudes.

« Akili, Zo'kar y croît qu'il a trouvé le tout-droit. »
« Mhr ? »
« C'est... Sous les pieds de lui. Y faut creuser. »
« Fa'da, il peut pas être sous la terre, soupire l’autre en se massant les paupières. Ou il est enterré ! Mais l'Amulette, elle vibre pas pour quelqu'un qui est mort, il le sait. Donne, il va regarder. »
Zok’ar consent enfin à céder son jouet. Il s’appuie sur ses poings et se penche lourdement en avant pour regarder Trik’we dans les yeux. Celui-ci sent le souffle chaud du colosse balayer ses mèches rosées lorsqu’il renifle un air interrogatif.
« … Fa’da ? »
Le chevaucheur balance sa main par-dessus son épaule, le teint blême mais le sourire large. Il prétexte que leurs histoires de famille sans queue ni tête commence à l’ennuyer pour donner à sa fuite des allures de départ. Le regard perçant d’Akili lâche le grigri pour se poser sur lui. Trik’we tourne les talons et les salue en mettant Pa’ku à l’honneur. Il s’esquive ensuite dans les Tarides, le cœur frappant un rythme bien plus rapide que celui que ses jambes peuvent battre. Derrière lui, il entend le hurlement bestial du redoutable qui le charge dans un nuage de poussière ocre.

Alors il court.

 
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Trik'we

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MessageSujet: Re: Le Vi'griot   Le Vi'griot Icon_minitimeJeu 20 Mai 2021 - 16:40

Différencier le poison
du remède
« Shai'ri, c'est leur famille. Ils veulent juste discuter. » Akili tente d’adoucir une Métti peu coopérative. La trollesse de Vol’dun hausse simplement des épaules, prétextant ne pas comprendre ce qu’ils attendent d’eux exactement. Elle gagne du temps, gratte des grains où elle peut pour les fourrer dans leur sablier fissuré.

Zo’kar s’est placé face à Trik’we. Il pointe lentement son doigt démesuré vers lui, si proche qu’un pas de plus pourrait suffire à lui enfoncer le nez dans l’ethmoïde.
« … Panier de provisions … » marmonne le redoutable, et il grimace sous l’effort de la concentration.
Le jeunot écarte doucement l’indexe mouchard avec le dos de sa main. Il ne parvient pas vraiment à retenir ses oreilles qui s’inclinent en arrière pour trahir sa préoccupation, fauve effarouché hérissant la fourrure de sa nuque pour maquiller sa frayeur avec le masque de l’irritation. La bobine de fil de ses pensées se déroule à grande vitesse. Zo’kar ne va pas tarder à replacer son visage sur celui du petit zandalari qu’il a aidé à se cacher dans Zul’drak une année plus tôt. Et avec ce zandalari, la Shai’ri se tenant à ses côtés. Le lien est évident, même un pauvre d’esprit comme lui peut le retracer. A cette époque, Zo’kar marchait avec Mwan’ga. Mais après l’abandon de ce dernier, laissant son petit frère redoutable blessé à la merci des pas-morts, l’incertitude plane quant aux jeux d’allégeance au sein de cette famille écartelée par le deuil. Le tout est de parvenir à différencier le poison du remède.

Derrière eux, la patience d’Akili commence à s’écailler.
« Pourquoi elle est avec eux ? Ils veulent quoi à la sœur ? » répète-t-il d’un ton plus ferme.
Il a entendu Métti prononcer un peu trop fort le nom de Shai’ri. Entre cet impair et la mémoire du géant qui devrait bientôt avoir terminé de faire le tour de sa cervelle pour le frapper d’une révélation, la menace approche sur les deux flancs. Trik’we prend une grande inspiration. La fuite n’est plus une option et se laisser emporter passivement par le vent des circonstances n’en a jamais été une. Alors il déploie ses ailes et laisse ses plumes goûter à la nature de cette bourrasque dans laquelle il est tombé. Et puis il la domptera.

« Zo'kar, il avait l'air de tenir à la Shai'ri, pas vrai ? »

Le troll redoutable gronde sourdement tandis que le regard de l’aîné drakkari s’arrondit. Le colosse incline son large crâne.
« Shai'ri, elle était pas méchante avec Zo'kar... »
« Moi, je t'ai vu la serrer dans tes grands bras alors qu'elle était encore qu'une trollionne, continue l’apprenti parle-esprits, évoquant des visions partagées qui font froncer les arcades sourcilières d’Akili. Sa tête à elle reposer sur ton épaule à toi. Veiller sur elle et sur sa survie à Zul'drak. Tu la protégeais de certains de tes frères. Ceux qui peut être bien lui auraient fait du mal si l'occasion, elle leur avait été donnée. Peu importe si c'était pour une cause plus grande, toi t'avais pas l'air de vouloir du mal à Shai'ri. Y’a pas plus solide que le lien du sang. »
Zo’kar montre les crocs. Faire remonter ces souvenirs-là ne se fait pas sans pincement et Trik’we est rassuré par l’attention qu’il suscite. Temps qu’ils se poseront des questions à leur sujet, ils hésiteront à les tuer. Mais Akili est plus réfléchi que son cadet. Il sort la certitude du brouillard soufflé par le chevaucheur.

« Il a avoué. Bien. Elle est où ? »

Le jeunot l’ignore temps qu’il le peut encore. Il est méfiant. Trop peut-être. Il a sur les lèvres le goût amer de l’hydromel vénéneux que Woga et Mwan’ga lui ont fait boire quelques jours plus tôt dans l’un de ces instants où le rituel d’Ebusi’khan lui avait ôté toute lucidité. Alors il prélève sur la loyauté vérifiée de Zo’kar de quoi se rassurer. Il désigne l’aîné et la trollesse à crète brune.
« Pour protéger Shai'ri, moi je te fais confiance. Ceux-là, la confiance peut aussi leur être donnée tu crois Zo'kar ? »
Le géant se penche dangereusement. Ses petits yeux plissés se plantent dans ceux du chevaucheur pour y enfoncer une menace.
« Où est Shai’ri » dit-il d’une voix grave en détachant chaque syllabe. Trik’we soutient son regard pour opposer l’intimidation du drakkari à sa détermination. Il a déjà décapité un troll redoutable lors de sa première mission auprès des Héritiers. Il apprécie Zo’kar, mais s’il s’avère qu’il est resté du côté de Mwan’ga ou d’Uon’go, mojo drainé ou non il se sent capable de recommencer pour sauver Shai’ri. Il accorde la réponse qui donnera une idée de sa propre position.
« A l'abris, qu'il s'en fasse pas. Elle se repose des blessures que votre fa'da lui a laissé dans l'âme. »

Ses yeux dévient pour percevoir Akili le pointer vivement avec son bâton-tiki.
« Qu’il tienne sa langue et ne crache pas sur le Fa'da ! Compris ?! » prévient le sorcier.
Métti se tend, ses épaules se redressant subtilement. Le chevaucheur prend note de la fidélité imprévue du féticheur mais n’escalade pas dans un conflit frontal qu’ils ne peuvent pas remporter. Il assure que la vérité est déplaisante, mais vérité tout de même. Il se tourne ensuite vers Zo’kar, parle bas pour lui confier discrètement cette sincérité qui lui fait tant défaut parmi les trolls menteurs et trompeurs.
« Moi, j'espérais que tu survives grâce au panier et aux avertissements qu'on t'a laissés. Maintenant ce que j'espère, c'est de pas m'être trompé à ton sujet. »
Le redoutable se redresse en roulant des épaules.
« Personne y fait jamais confiance à Zo'kar, d'habitude. Lui et lui, ils ont fait confiance, constate-t-il en désignant le zandalari et son aîné tour à tour. Alors Zo'kar, il fait la confiance à eux. Mrh. »
« Seyolo, elle t'a fait confiance pour la porter dans l'eau !  Ah ! » précise la brune.  
« Ouais, mais l'a crié dans les oreilles. Il a pas confiance pour ses oreilles. »
Trik’we tourne un regard incertain vers la trollesse. Il n’a fait que l’apercevoir dans ses visions sans jamais effleurer un souvenir la concernant. Elle transporte sur son dos un petit être qu’il l’a entendue appeler Jabu. Il émet des sons étranges, entre la plainte et le grognement. Un trollion dans une écharpe de portage ? Non ce n’est pas ça, et sa raison se crispe à cette constatation. Ce sont des nécromanciens.  

« Pourquoi la petite soeur elle est avec eux ? »

Trik’we étouffe ses obsessions avant qu’elles ne formulent des pensées. Il se ferme, nie ce qu’il vient de voir. S’il ne regarde pas l’abominable réalité, alors elle existera peut-être un peu moins.
« Mwan'ga, il comptait t'abandonner à Zul'drak. T'as survécu comment ? » dit-il à l’intention du redoutable d’une voix blanche.
Akili tique de l’oreille et Zo’kar pince ses grandes babines.  
« Akili il a sauvé Zo'kar. Zo'kar il aurait pu y arriver tout seul, mais pas tout seul sans Akili. » déclare-t-il.
« Il abandonne pas son frère. La famille, c'est important. »
L’aîné observe Trik’we avec son air placide. Le zandalari s’approche tandis que le drakkari replace son bâton-tiki à sa ceinture, dans son dos.
« Tu disais pourtant que certains de tes frères, ils voulaient peut-être bien du mal à la Shai'ri. Ceux-là aussi, tu les abandonnes pas ? Quand ta famille, elle se déchire en plusieurs morceaux, il y a bien des choix qui doivent être faits. Les tiens, ça a été quoi ? »
L’autre prend le temps de le dévisager de plus près avant de lui répondre.
« C'est exact. Ils sont comme ils sont. Leurs raisons, ils les pensent bonnes. Même si leur chemin, ils se sont divisés, ça reste ses frères. Ils arpentent leur voie. Ce qui lui importe à lui, c'est de protéger ceux qui sont avec lui. Mais si ses frères souhaitent la rédemption, ils l'auront. »

Son regard glisse ensuite de Trik’we à Métti, sa patience épuisée.
« Elle est où ? »

Le chevaucheur a entendu son sens du devoir familial et ses instincts protecteurs. Mais il entend aussi sa méfiance qui lui rappelle toutes les fois où il a payé chèrement sa confiance offerte plus que méritée. Alors il se fige dans sa position défensive, retient le drakkari. Et temps que des questions s’écouleront de ses lèvres pour préciser petit à petit leurs intentions, il le retiendra.
« Tes frères, ils veulent la mort de votre fa'da pas vrai ? Pour ça qu'ils traquent la Shai'ri ? »

Akili arrête son regard froncé sur le jeunot.
« Toi, tu sais trop de choses. » 

 
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Shai'ri

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MessageSujet: Entre deux Mondes.   Le Vi'griot Icon_minitimeMar 25 Mai 2021 - 4:26

Vaste étendue avare en couleur, ou la pluie incessante semble ajuster son débit pour drainer les émotions et modeler l’humeur.
Encore une fois, elle se retrouvait entre les branches du grand Arbre qui, dans le monde tangible, faisait office de toit protecteur, la coupant du monde extérieur, comme si chaque branche se refermaient doucement au-dessus d’elle.
Leur premier nid qui avait vu fleurir de nombreux souvenir agréable.
Mais ici, à défaut des feuilles verdoyantes, cueillant la rosée de tous les matins, chaque branches, tantôt épaisses tantôt fines et effilées, soutenaient une multitude de Lucioles posées sur l’écorce de bois.
Echappées de son imagination, elles grignotaient la peau épaisse mais fragile de l’Arbre, mettant à mal son rôle de gardien de l’âme.
Le grattement incessant de leurs mandibules contre la chair de bois est devenu fond sonore habituel pour la Drakkari qui perdait son regard sur le tapis d’étoile qui ondulait dans le ciel.
Et, à nouveau, la voix résonna dans le lointain.

- Eh.. Shai’ri, Shai’ri !!

Ses oreilles ne se soulevèrent pas.
Elle était habituée maintenant à cette feinte où parfois la voix du Chevaucheur l’appelait au loin pour  la sortir de sa cachette et l’emmener dans les coins les plus sombres de son esprit.
D’autres jours, c’était la voix du Scalp-rouge qui criait son prénom.
Habile manœuvre de sa conscience abusée qui jugeait le parle-esprit assez compétent pour la tirer de là.
Ses iris d’une teinte glacial vinrent à nouveau épouser la sphère céleste et l’aurore boréale bariolé à l’aspect crayonné qui dansait entre les astres.
Elle se fit la réflexion que la lueur pâlissait au fur et à mesure que son âme était cloitrée dans sa prison spirituelle et souhaitait instinctivement qu’elle reprenne des tons plus vives  et plus encourageants.
Sa main se souleva pour, d’un doigt, pointer le ciel et faire danser le bout de sa griffe entre les couleurs.
L’âme rêveuse, dans les teintes colorés se creusa un sillon au passage de son doigt, comme une tâche de pigment que l’on étale sur la pierre.
Sa griffe tourna, enroula chaque ton unique et les rendit bigarré avant de les distiller en grattant avec son doigt de haut en bas.
Soudainement, ses oreilles tiqua et quelque chose attira son attention dans le chemin pâle tracé entre les couleurs.
Intriguée, la Drakkari plissa ses sourcils et sans détacher son doigt de sa surprenante peinture, se redressa en position assise à l’aide de son autre main.
Les racines grises d’un Arbre, plus fin et coloré que celui dans lequel elle était nichée se dessinait lentement.
Curieuse, sa griffe poussa doucement chaque bord, l’un après l’autre pour les élargir toujours plus.
La lumière scintillante et soudaine qui s’en dégageait lui fit plisser les yeux mais elle ne cessa pas d’effriter la toile pour autant, portée par une insatiable curiosité qu’elle sentait palpiter au creux de son ventre et s’étendre dans tout son corps, au point d’appuyer ses genoux contre la naissance d’une branche et venir ronger la fresque colorée avec sa deuxième main.
L’image matérialisait avec plus de détail l’écorce et le tronc de l’Arbre, laissant rouler sur sa main une sève lumineuse qui s’étendit sur son bras pour ensuite venir se déposer au coin gauche de ses lèvres.
En pleine sensation d’apesanteur, elle ramena ses deux mains contre son visage pour ,d’un doigt, se débarrasser du fluide rayonnant qui semblait coller contre sa joue sans qu’elle ne puisse s’en défaire.
Son cœur loupa un battement quand elle se rendit compte que cette impression paraissait plus réelle qu’à l’accoutumée, comme si son corps endormi retrouvait ses sens.
Alors que la Drakkari se redressa de toute sa hauteur pour observer avec intérêt le ciel qui arborait à présent le schéma d’une pierre rugueuse enserré de lierres, les insectes étincelant s’envolèrent de l’écorce grignotée, laissant sa silhouette baigner dans l’obscurité un court moment.
Puis, d’un pas rendu maladroit par la sensation d’enchevêtrement qui courait sur ses chevilles, elle s’avança, contemplant les anfractuosités qui creusait la pierre.
Souvenir mélangé à son imagination très certainement, mais l’odeur d’humus et de bois parvinrent à ses narines.
Elle inspira à plein poumon pour s’imprégner de cette odeur qui lui paraissait venir d’ailleurs, franchir les parois du dôme dans lequel elle se sentait enfermée.
Et brusquement, la branche céda.

___________________________________________________________


Allongée sur le sol, son regard s’ouvrit doucement sur de fines branches qui, balayées par un vent qu’elle pouvait sentir courir sur sa peau, dansaient au-dessus d’elle.
Perturbée, elle fronça des sourcils en remarquant qu’il ne s’agissait pas de l’Arbre ou elle et le Zandalari avaient pour habitude de nicher.
La bouche sèche et ses articulations endoloris, elle plia ses genoux, cherchant une position plus confortable le temps que ses pensées chasse le brouillard qui enveloppait son esprit.
Ses paupières clignèrent rapidement quand elle vit des doigts enlacer les siens.
Mais la surprise fit rapidement place à la joie quand elle reconnu ceux du Chevaucheur quémander la présence des siens.
Comme si elle les redécouvrait, ses propres doigts tâtèrent les siens, caressèrent la courbe de l’une de ses griffes, se délectèrent de chaque sensation que sa peau pouvait lui procurer pendant une longue minute.

La voix nouée mais vibrante de bonheur du Troll vint la tirer définitivement de ce sentiment d’entre-deux.

-Hey Shai’ri !


Rendue silencieuse par l’émotion intense qui l’assaillait, elle déposa de nombreux baiser contre les doigts fins du jeune Troll, son visage fendu d’un immense sourire malgré le sanglot qui étouffait dans sa gorge.
Ses lèvres appuyées contre la main de son compagnon, elle se redressa fébrilement pour pouvoir plonger son regard dans ses iris verts, s’enfoncer dedans et s’y perdre, retrouver la chaleur de sa présence et son confort.
Elle reconnaissait parfaitement l’endroit, celui où ils construiraient leur Hutte, proche du grand Lac.
Elle découvrit ses dents dans un sourire et sa voix enrouée, basse et fatiguée s’éveilla à son tour.

-Eh, Trik’we !!


Elle ne remarqua pas la mine inquiète et les oreilles du Zandalari qui s’étaient affaissées alors qu’elle embrassait ses doigts et s’était perdu dans son regard.
Et ses bras  s’étaient refermés bien trop tôt autour d’elle pour qu’elle puisse le remarquer.
La Drakkari se rapprocha pour s’enfoncer dans cette étreinte qui lui avait tant manqué, ayant le sentiment de laisser derrière elle ses craintes constantes et le désespoir qui palpitaient dans sa poitrine, naissant dans chaque nuit nouvelle une source d’angoisse profonde.
Mais à présent, c’est le cœur du Troll qu’elle sentait cogner contre sa poitrine et danser avec son propre cœur, palpitant de bonheur.

- Eh, bon retour chez nous Shai'ri.. Elle a voyagé longtemps !

La jeune Trollesse glissa son visage dans le cou du jeune Troll, s’imprégnant de sa chaleur et son odeur, comme si toutes ces journées passé de l’autre coté avait creusé un manque toujours plus profond.
Au creux de ses bras, elle se sentait plus vivante que jamais et laissait rouler ses lèvres contre la peau de sa clavicule, douce et chaud, sans jamais perdre son sourire.
A nouveau, elle fut secouée d’un sanglot léger.

- Elle en est certaine maintenant… Elle est vraiment réveillée.
Les lèvres de la Drakkari se serrèrent sans jamais effacer son sourire et elle releva la tête pour appuyer son front contre le sien et fermer les yeux, laissant leurs deux souffles s’enlacer et caresser leurs visages.
-Il était tout le temps là avec elle.. Il faisait sombre, mais il ne la quittait jamais.

Le rire léger du Chevaucheur roula contre ses oreilles et il l’étreignit à nouveau, un peu plus fort, pressant lui aussi son front contre celui de Shai’ri.
Elle souffla à son tour un rire bref qui s’envola pour rejoindre celui de son compagnon, formant à eux deux une ode protectrice contre toutes les intempéries de la vie, à l’abri de tout et de tous.

- Elle a voyagé dans une tempête qui nous a séparé physiquement, mais l'esprit de la Shai'ri et celui du Trik'we, ils sont les fils d'une même étoffe. Ceux qui ont essayé de nous déchirer, ils ont tremblé en voyant que cette corde là, rien ne peut la rompre. Ce qui se découd est recousu en quelques mots et battements de coeur partagés.

Le Zandalari connaissait parfaitement sur quelles notes appuyer pour faire vibrer l’âme de la Drakkari, pour l’emporter ailleurs et la bercer dans un cocon rassurant.
Elle souffla ensuite un rire et comme pour ponctuer les paroles du Chevaucheur, elle fit danser la pointe de son nez avec la sienne sans que leurs doigts ne se délient.

- C'est parce qu'ils sont indubitablement noués qu'elle a réussi ce soir à sortir sa tête de la tempête qui la malmène.

C’est lentement qu’elle recula sa tête pour revenir plonger son regard sur les traits délicats de son compagnon.
Elle aurait aimé y lire seulement le bonheur semé par leurs retrouvailles, mais le regard fatigué du Chevaucheur surplombait des traits tirés par ce qu’elle devinait être des nuits entières d’insomnie.
Détachant avec délicatesse ses doigts, les poignets encore liés par la corde qui les maintenaient ensemble, des siens, elle souleva ses mains pour venir caresser avec douceur et inquiétude sa joue gauche, grimpant les pointes de ses griffes jusqu’aux plaques si particulières qu’il possédait sur sa joue.
Le regard du Troll, plongé dans le sien, percevait à la perfection les angoisses camouflées de la Drakkari.
Il pris parole bien avant-elle.

- Elle se sent comment, eh ?

Tout en l’observant, le Zandalari glissa ses doigts sur les contentions qui retenaient ses poignets serrés l’un contre l’autre.
Il sembla attendre sa réponse avant de prendre le risque de la libérer, ayant gravé la précédente crise de la Drakkari au fer rouge dans sa mémoire.
Cette dernière inclina ses oreilles, baissant en même temps son regard sur ses propres doigts occupés à caresser tendrement le grain chaud de sa peau.
Malgré cela, elle ne cessa pas de sourire.

-  Il ne doit pas s'inquiéter pour elle.. D'acc' ? Un jour, un Troll, petit de l'extérieur mais grand de l'intérieur, il a dit qu'ils ne cesseront jamais de se retrouver sur leur branche.

La Trollesse appuya un court instant sa joue contre celle de son Troll, fermant les yeux pour, dans une tentative inespérée, faire fuir la crainte d’un départ trop soudain qui germait en elle.

-Et c'est vrai. Peu importe où elle semble aller. Elle est toujours, toujours là avec lui et lui, il est toujours avec elle. Il se souvient ?

Les doigts de la Drakkari se promenèrent alors sur les courbes du visage de son compagnon, ses iris d’un pâle froid revenant se nouer aux siens alors qu’elle acquiesça sobrement pour lui répondre et le conforter dans l’idée que défaire ses liens n’avait rien de dangereux.
Les doigts du Zandalari s’activèrent pour dénouer la corde qui, au fil du temps, avait gravé dans sa chair sa présence.
Elle ne pris pas vraiment le temps de se masser les poignets pour faire partir la désagréable sensation sur sa peau et encourager son sang à remonter avec plus d’énergie dans sa main et ses doigts au moment où il serra sa main contre la sienne.

-Si il ne s'inquiète pas pour elle maintenant, avec tous les vents imprévisibles et glacials qu'elle traverse, alors il s'inquiètera jamais pour personne ensuite, eh.
Il croit en elle et sa force, d'acc ?


Son regard plongé dans celui de sa compagne, il ferma un court instant les yeux et fléchit les oreilles.
Elle a toujours su lire à travers les expressions si généreuse de son visage et ses sourcils se plissa en le voyant faire, tableau évident de la tristesse couplé à la crainte et un peu d’incertitude.

-Mais il l'avait perdue. L'espoir aide à attendre. J'ai patienté jusqu'à ton retour. Mais parfois, il la sentait tirée au loin dans un voile noir qu'il ne pouvait pas franchir.
Parfois il avait peur qu'elle ne retrouve pas le chemin jusqu'à leur branche toute seule, de ne pas avoir le moyen de la guider jusqu'à leur nid  


La Drakkari lui souriait avec une tendresse indescriptible, ses chevilles nouées se mêlant amoureusement entre les jambes du Chevaucheur.
Elle souriait, par amour principalement, mais aussi pour que lui continue d’y croire.
Et elle aussi.

- Son chemin, elle le retrouvera toujours... Il n'y avait que de l'obscurité là où elle était. Mais elle voyait sa lumière à lui... Il n'a jamais cessé de la guider.

Sans même perdre un peu de ce sourire qui semblait figé sur son visage, elle approcha son visage du sien pour, à nouveau, venir joindre leurs deux fronts.
La proximité ne permit sûrement pas au jeune Troll de remarquer que ses oreilles s’étaient affaissées et la voix de la Drakkari se fit plus blanche et basse, le ton de la confidence.

-Elle l'a vu diminuer et elle a eu peur.

Sans dénouer leurs deux fronts, elle se pencha suffisamment pour venir déposer ses lèvres ,bien trop sèches pour qu’elle puisse réellement en profiter, contre les siennes, dans le coin, à la naissance de sa Défense droite.
Il était là et, à cet instant, c’est tout ce qui lui importait.
Elle avait l’impression que la voix du Zandalari n’avait jamais été aussi belle que depuis son réveil.
Après avoir passé des Lunes à espérer l’entendre réellement, à présent, c’était chose faite.
Sa voix portait haut et était radieuse et mélodieuse, elle en connaissait les nuances plus basse et sombre comme d’autres plus douces, presque ronronnante ,qu’elle espérait bien être la seule à pouvoir entendre.
Elle poursuivit.

- L’amour qu'ils éprouvent l’un pour l’autre, il la guidera toujours. Ce qu'ils sont, tous les deux, ils courent dans la même source d'eau. Parce qu'ils y croient à ce qu'ils veulent et vont vivre. Parce qu'ils savent que des choses, ensemble, ils en ont encore toute une vie à en découvrir.

Le Chevaucheur baissa son regard sur les poignets de la Trollesse et les massa délicatement pour les soulager avec la douceur de ses doigts.

- C'est parce qu'elle croit que lui va mal qu'elle n'ose pas lui parler de ce qu'elle a réellement vécu dans ses rêves, eh ?

La Drakkari se tut et les iris Verts de Trik’we se redressèrent dans les siens.

- Elle sait qu'ici elle est en sécurité, pas vrai ? Elle n'a plus besoin de cacher la couleur de son mojo pour survivre. Personne ne va jouer avec ses teintes et utiliser ce que son cœur lui fait ressentir contre elle. Elle peut parler vrai.

Les yeux bleus de la Trollesse s’enfoncèrent dans ceux du jeune Troll et elle reprit son sourire qui, au fur et à mesure des paroles du Chevaucheur, avait pali.
Ses mains se serrèrent dans les siennes.
Et elle souffla avec une certaine nonchalance.

- Le cauchemar dans lequel elle s’est perdu… Petite, elle s’y était perdu aussi.

La Drakkari releva une épaule en souriant, le masque de la confiance et l’assurance peint sur son visage.
Le Zandalari ne la quittait pas des yeux et, tout en l’observant, déposa un baiser contre ses doigts.
Elle voyait dans son regard l’inquiétude grandir et elle se rendait bien compte que peu importe le ton qu’elle prendrait, il savait lire au-delà de derrière le voile avec lequel il est lui-même habitué à se couvrir.

- Ses rêves .... Elle vient d'en sortir mais lui il sait ... qu'en parler à quelqu'un c'est essuyer les dernière gouttes qui continuent d'engluer notre esprit avec les émotions qui restent.
Ils veulent qu'on se sente seul et traqué dans nos rêves, eh. Mais ici, les rêves elle peut leur enlever tout leur pouvoir. Faut pas qu'elle s'isole d'acc ?  


Quittant le regard du Chevaucheur, Shai’ri décida de faire courir le bulbe de son pouce contre la courbe de sa lèvres inférieure.
Chaque détail de son visage la poussait à étendre son affection toujours un peu plus, crépitement de son amour qui coulait dans ses veines et alimentait son cœur, juste  profiter pleinement de ce moment à eux deux avant qu’il ne disparaisse dans la spirale du temps.

- Elle veut rester ici. Avec lui. Elle veut plus repartir... alors ce qu'elle a vu... ça n’a pas d'importance. Parce qu'elle retrouvera toujours le chemin pour rentrer.

Son pouce quitta la douceur de sa lèvre inférieure et sa main roula jusque dans ses cheveux rosé, chaque mèches offrant une délicate caresse à ses doigts.
Le jeune Troll attrapa un sourire et son front se posa délicatement contre celui de la Drakkari, accrochant ses iris aux siens.

-Il a rêvé lui aussi. Déliré également. Ces rêves, elle ne peut pas lui faire croire à lui qu'on peut les oublier une fois qu'on se réveille. Qu'ils n’ont pas d'importance, c'est pas vrai. Pas en parler, c'est leur laisser le pouvoir de te hanter.

A son tour, il passa sa main dans les mèches blanches de la Trollesse, son pouce effleurant sa joue avec une délicatesse que lui seul en avait le secret.
Elle serra ses lèvres et baissa son regard sur le sol.
Si de l’âme, les yeux sont également les fenêtres des émotions et elle ne voulait pas lui transmettre ce qu’elle ressentait à ce moment-là, le préserver était d’une importance capitale.
Mais elle ne lui cacherait rien.

- Elle s'y sent comme réveillée. Elle est à un endroit et partout à la fois.. Comme si des Morceaux d'elle-même ils étaient dispersés dans le paysage.
Il fait sombre... Parfois, elle ne voit plus rien... Mais lui, elle sait qu'il est là, toujours près d'elle.


Shai’ri releva un regard plein de tendresse dans celui de son compagnon, un regard débordant de passion mais aussi de gratitude.
Son sourire s’étira et son regard brilla.

- Elle ne se sent jamais seule eh... Et quand elle recherche ces petits morceaux d'elle même... parfois, elle replonge dans ses souvenirs. Très souvent, il est là... Et elle se revoit avec lui... Ces souvenirs là, elle met toujours beaucoup de temps à en sortir.. Parce qu'elle en profite au maximum.

Le Zandalari restait muet, l’observant vivre et bouger, attentif à ses paroles qu’il avait attendu depuis si longtemps.
Elle raconta s’être réfugié dans un souvenir qu’ils partageaient à deux, celui de Rosée de Miel.
Un souvenir qui avait vu grandir leur complicité et leur tendresse qu’ils cachaient encore aux yeux de tous.
Elle lui fit part des papillons qu’elle avait ressenti lors de leur première nuit partagés, la timidité aussi mais surtout le bonheur indescriptible de dormir dans la chaleur de ses bras.
Il souffla du nez et ses doigts fins déposèrent une caresse tendre contre la courbe de son visage.

-Il n'oubliera jamais chacun de ces souvenirs. Ils sont gravés dans son esprit comme un tatouage rituel peut l'être dans la chair. Son espoir, c'est avec ces visions là qu'il l'entretient, lui aussi.

Ses yeux clos, un sourire fendait le visage de la Drakkari qui laissa ses doigts déposer des poussières de tendresse contre la joue du Troll, dans une caresse tendre et sucré.
La voix basse, elle chuchotait presque.

- Ils vont surmonter tout ça eh... Ils sont faits pour voler haut et longtemps... Pour explorer le monde s'en jamais s'en lasser...

La Trollesse souleva ses paupières pour l’admirer quelques secondes avant de céder à cette tentation trop forte et déposer un doux baiser contre son nez avant de laisser son regard plonger dans celui du Zandalari.
Elle fit tomber ses oreilles vers l’arrière en constatant son inébranlable inquiétude.

- Trik’we… Que s’est-il passé ?

Il ignora d’abord sa question pour soulever autre chose mais elle remarqua son sourire qui perdait en intensité à sa question.

Pourtant, même petite elle arrivait à sortir du noir de ce rêve pas vrai ? Ça c'est parce que même sans Trik'we, la Shai'ri elle reste forte.

Shai’ri baissa son regard sur les lèvres de son compagnon.
Si ces dernières semblaient l’inviter continuellement à y déposer les siennes, c’est un regard cette fois un peu fuyant qu’elle y accrochait.
Ses oreilles s’affaissèrent.

- Petite.. Elle n’en est pas sortie toute seule.. Ca, elle s’en souvient. Mais comment, elle ne saurait pas le dire.

Quelques secondes de silence passèrent et elle échoua son regard sur ses propres chevilles encore nouées.
Les commissures de ses lèvres pointèrent alors vers le haut et son regard escalada l’agréable silhouette du Chevaucheur pour venir capter ses iris vertes.

- Il lui raconte ce qui lui alourdit les ailes et la détache ? Elle aimerait profiter du Lac avec lui.

Trik’we serra ses lèvres puis délicatement, il vint cueillir ses lèvres avec tendresse dans un baiser court avant de lui répondre d’une voix basse, son regard plongé dans le sien.

- Eh, quand elle sera plus reposée, d'un vrai repos, il lui parlera des goutes qui se sont écoulées sous le pont au-dessus duquel elle dormait, d'acc ?
Faudra qu'elle parle de ses rêves, ceux qui la hantent depuis si petite. C'est important.


La Drakkari tira ses oreilles en arrière et ses sourcils se plissèrent.
Elle secoua doucement la tête.
Elle aussi voulait prendre de ce qui le rongeait, l’alléger, qu’il puisse à nouveau s’envoler et respirer en souriant.
Son rire aérien et sincère lui manquait terriblement, mais le voir heureux et son regard étinceler encore plus.

- Elle est reposée ! Qu'il la laisse essuyer les larmes qui grattent derrière son regard à lui !

Alors qu’elle plia doucement ses genoux pour retrouver une position plus confortable, son regard se teinta d’une inquiétude profonde.

– Trik’we.. Elle le fera, d’acc’ ? Mais maintenant qu’elle est là, elle veut pouvoir être l’Arc-en-ciel sur lequel il dépose ses soucis. Elle est assez forte pour ça !

Elle sentit un sourire attendri et incontrôlable grimper sur son visage.

– Même dans l’obscurité, elle veut être une branche solide pour lui.

Le Zandalari se pencha pour délier lentement la corde qui nouait ses chevilles, sans la regarder.

- Elle est de retour à leur branche. Il n'est plus seul, elle est là et n'a pas disparue. Alors il va bien maintenant.

Il observa la corde quelques secondes avant de redresser son regard sur celui de la Drakkari, les oreilles tirées vers l’arrière.

- Elle comprend qu'il devra la rattacher après qu'elle aura pu un peu se rafraichir, pas vrai ?

La Trollesse capta son air désolé et elle opina doucement du chef, sans se défaire de son sourire.
Elle approcha ensuite ses mains fébriles du visage de son compagnon, l’entourant affectueusement, le bulbe de ses doigts épousant à la perfection le grain de peau tendre et chaud de ses joues.


- Qu'il ne s'en fasse pas, elle comprend. Elle ne leur en veut pas, elle sait que c'est pour sa sécurité à elle et la leur.


Shai’ri s’avança doucement, assez pour que leurs fronts communiquent à nouveau.
Il avait toujours pris soin d’elle, l’avait aidé à s’envoler quand elle se croyait définitivement au sol et dans son regard, elle comprenait qu’il ne cesserait jamais de croire en elle.
Ce qu’elle voulait lui dire, c’est que elle non plus ne cessera jamais de croire en lui, elle le savait assez solide pour affronter toutes les tempêtes qui se présenteraient à eux.
Car ni lui et ni elle ne seraient seuls.
Leurs âmes voguaient sur le chemin du temps ensemble et même si l’une d’elle venait à se noyer dans l’Océan du doute et de la peur, l’autre apporterait toujours le souffle libérateur.


-Elle veut qu'il sache qu'elle l'aime. Qu'elle l'aime plus que tout et n'importe quoi. Et qu'elle ne lui en veut pas et ne lui en a jamais voulu de se cacher entre des branches encore inatteignables pour elle. Parce qu'elle sait que peu importe où il se trouve, qu'elle le voit ou pas, sa vie elle s'est mêlée à la sienne. Au point que ce qu'ils vivent rend tout possible. Ensemble, ils réinventent le monde et vont le rendre toujours plus beau. Elle sera toujours là pour cueillir ces fleurs épineuses qui rendent ses pensées et ses émotions si douloureuses, de remplir les failles qui creusent son âme avec son amour et son attention.


Après un dernier échange de mots tendres, de rires discrets et de regard complice, ils se levèrent pour profiter de la fraîcheur de leur Lac sous le regard attentif de la Lune qui brillait dans la pénombre du ciel.
Nue et entre ses bras, elle se sentait revivre.
Il humidifia ses cheveux et roula ses mains sur ses épaules dans une tendre Toilette au moment ou elle lui envoya une bourrasque d’eau dans un éclat de rire.
Bien mal lui en a pris quand elle se rendit compte que ses courbatures revenaient au galop après ce geste malheureux.
Alors ils s’étreignirent et se séchèrent, profitant de l’air tiède des Tarides, enveloppés dans un drap de tissu.
Elle aurait aimée lui faire l’amour, se sentir fondre contre lui et grimper les cieux à ses cotés, voir les étoiles scintiller au-dessus de leurs deux corps tremblants.
Mais l’épuisement que leurs deux corps subissaient était vorace et chaque geste leur coutait fort en énergie.
C’est le lendemain que la Drakkari se sentit à nouveau sombrer et, blottie contre le corps du Chevaucheur, couverte par son amour et sa tendresse, elle murmura la promesse de pouvoir se réveiller à nouveau.


____________________________________________


Se réveiller.
Ses paupières se soulevèrent et elle accrocha son regard sur le ciel vide de toutes étoiles et couleurs.
Elle sentait son corps endolori et se préserva de la douleur en restant immobile.
Ses pensées étaient clairs, comme si ici coincée entre deux mondes, la torpeur n’existait pas.
Elle grimaça et finalement, entreprit de se redresser sur son postérieur pour jeter un regard circulaire sur ce qui l’entourait.
L’Arbre était là.
Rongé par les Lucioles, il était mort.
Son écorce avait pris une teinte pâle et crayeuse et la pluie qui fouettait les branches en fit tomber les plus fines.
Elle souleva ses iris clair sur le ciel, le cœur gonflé par l’espoir d’y revoir la lueur bigarrée qui l’avait ramenée dans le monde tangible, celle qu’elle prêtait à l’âme du Chevaucheur.
Mais seul le vide lui répondit.
Et les gouttes de pluies qui éclatèrent contre son front et ses joues.
Sa lumière était ailleurs, la Trollesse en avait la certitude.
Quelque part, perdu dans l’immensité de ce monde, palpitait ce qui la reliait à lui.
Elle se redressa, constatant tristement que l’Arbre ne serait plus un abri pour elle.
L’urgence de la situation la fit se glisser dans les étranges Buissons aux feuilles roses ou fleurissait de minuscules Fruits solaires.
Shai’ri se recroquevilla sur elle-même et redressa ses oreilles.
Elle devait être plus prudente que jamais.


-Madame Shai’ri ?


Alors quand la voix fluette et inconnue au loin l’appela, elle ne répondit pas.
Et quand au même moment elle entendit sa propre voix appeler le jeune Chevaucheur, c’est tendu et effrayé qu’elle cacha son visage entre ses bras.


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MessageSujet: Re: Le Vi'griot   Le Vi'griot Icon_minitimeJeu 27 Mai 2021 - 2:55

Je voyais une
bête
Le serpent de bois tremble entre les doigts de Trik’we, ses vibrations traversant la peau pour résonner contre les parois de ses veines. L’amulette appelle le parasite cousu au tissu de ses organes et l’esprit du maléficeur pousse son corps à lui répondre dans un frissonnement ténu. L’infime sensation fait froncer les sourcils du zandalari. L’amulette a été taillée par la grande ma’da Matu’maini, à une époque où elle se refusait à perdre son fils dans les dangers dévorant du Norfendre. Il le sait parce qu’Uon’go le sait. Il se souvient du blizzard qui s'intensifie et de sa main fermée sur celle de Pa'cha. Le groupe loin devant eux, que des jeunes. Les guides, les deux premiers, tiennent des torches et sont à peine visibles. La peur au ventre de se perdre, de la perdre, dans l’immense tempête blanche.

« A mon avis, il est aveuglé par le fait de retrouver sa soeur. Il ne peut pas être raisonné. » conclu Métti. Elle termine de ligoter Akili en tirant sur la liane d’un coup sec. Le jeunot détache ses iris verts du regard magnétisant du reptile pour les soulever sur la silhouette assommée du drakkari.
« Il est peut-être notre seule ouverture pour enfin comprendre, stipule-t-il. Comprendre ce qu'il se passe dans cette famille. De quoi et de qui on doit préserver Shai'ri exactement. »
La trollesse de Vol’dun se redresse, l’expression mesurée afin de garder sa neutralité habituelle.
« Il sera fou furieux lorsqu'il se réveillera. »
Trik’we incline la tête d’un air entendu. C’était une certitude. Pourtant, leurs âmes agitées allaient devoir trouver une harmonie assez équilibrée pour pouvoir discuter. Et discuter longuement.
« La malédiction, l'Akili il a émis l'hypothèse que c'était peut-être pas Uon’go qui l'avait posée. »
« Sauf s'il est aveuglé par cette histoire. »
« Entre son admiration évidente pour son fa'da et le conflit avec Mwan'ga ... il nous manque des éléments pour comprendre. » Le zandalari désigne le sorcier d’un coup de menton. « Des éléments que lui il peut nous donner. »
« Que faire dans ce cas ? » interroge Métti en se tournant vers lui pour attendre sa décision.  

Le chevaucheur pose l’amulette à tête de serpent contre le poitrail de la trollesse de Vol’dun. Elle la récupère, les arcades froncées.
« Emporte Shai'ri avec toi. »
Ils se regardent un instant, transmettent la surprise de l’une et la détermination de l’autre, se rejoignent pour s’accorder dans un acquiescement confiant.
« Elle sera en sécurité auprès de ma famille. »
« Métti... mais..., bafouille Iko. Mais si... enfin... si la caravane est attaquée ? »
« Aucun risque. » déclare la trollesse.
Trik’we a retenu sa leçon et veut être certain de n’attirer aucun empoisonneur dans le quotidien paisible d’alliés qui auraient souhaité n'être que de passage sur leur chemin.
« Ta famille, elle est où ? »
« Aux portes d'Orgrimmar du côté d'Azshara. »

Il n’y a pas plus sûr dans les Tarides que la capitale orc pour tenir le groupe de drakkaris à l’écart. Il approuve d’un hochement de la tête avant de se fixer sur l’aîné de Shai’ri allongé.
« Je vous rejoins dans trois jours au plus tard. Utilisez l’amulette pour me retrouver si vous doutez. Lui et moi on va discuter encore un peu. »

Les deux trolls se mettent d’accord sur la coordination de leurs prochains mouvements. Une fois séparés, ils devront se remettre à leur seul bon jugement face aux imprévus qui leur bondiront certainement dessus. Ils s’assurèrent donc d’accorder leurs partitions avant d’entamer leurs solos d’improvisation. Ils se tournent ensuite vers Iko. La vision de ses petits doigts touffus pressés contre les tempes de Shai’ri pour plonger dans son esprit révolte encore Trik’we. Il manque au vulpérin l’éducation trolle pour pouvoir mesurer la lourdeur des conséquences de pareilles décisions.
« Un esprit, c'est un temple sacré, commence le chevaucheur. T'y rentres pas sans l’autorisation de l’entité qui y habites. Chaque pas que tu y fais de force, ça fissure les murs, laisse la trace indélébile de ton passage sur le pavement. Des cicatrices qu’on peut jamais oublier au réveil. » Le jeunot serre les lèvres, conscient d’exprimer sans le vouloir sa propre expérience. Les émotions et souvenirs de ceux qui ont souillé son âme de leur présence imposée ne l’ont jamais réellement quitté. Il ignore quand il pourra à nouveau se sentir lui-même et il craint que la trollesse ait à se poser le même genre de question lorsqu'elle recouvrira ses sens.
« Transforme pas le temple de Shai'ri en ruine. Ce que t'as fait là, c'était aussi dangereux pour elle que ça l'était pour toi. »
« Je pensais obtenir sa réponse pour vous aider, répond le renard en baissant son museau frémissant. Je suis navré... »
« La réponse, elle lui appartient, poursuit Trik’we. Elle se tend mais elle ne se prend pas. Elle te la donnera une fois qu'elle aura retrouvé le chemin vers son corps. Mais les esprits, c'est pas des grigris d'enfant à agiter quand tu veux obtenir une musique, eh. T'aimerais toi qu'on force l'accès à toutes tes pensées sans que tu ais ton mot à dire ? »
Le vulpérin affirme que non et semble comprendre. Tant mieux, car le sujet est assez sérieux pour que le chevaucheur ne témoigne pas de la même patience une seconde fois. Il lui promet d’entrer dans son esprit à lui pour lui faire voir toutes les couleurs de sa colère si l’envie de presser l’âme de la Shai’ri comme un vulgaire fruit lui reprend, et le petit canidé déglutit bruyamment. A ses côtés, Métti croise les bras, la mine inquiète posée sur son ami rouquin.
« Ca ne sert à rien d'entrer dans l'esprit de quelqu'un et forcer les choses, dit-elle. Encore une fois, tu aurais pu... perdre le contrôle. Tu sais très bien que tu commences à peine ce genre de choses. »
« Oh ben de ce que j'ai vu, c'était féroce quand même, commente Iko et le zandalari dresse les oreilles. Enfin... de ce que je me souviens. »
« Féroce ? Il a vu quoi ? »
« Enfin, féroce... je voyais... une bête. »
Les instincts du chevaucheur hérissent son échine.
« Explique tout. Que ton intrusion, ce soit la dernière, mais qu'au moins elle n'ait pas été inutile. »
« Je me cachais... Et juste avant que vous m'ayez sorti... la voix sortait de cette bête... C’était la voix de madame Shai’ri. Elle vous appelait monsieur Trik’we. »

Le jeunot sent son cœur se tasser dans sa poitrine pour se réfugier de l’information qu’il croit saisir.
« D'acc… »

 
Pando
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MessageSujet: Re: Le Vi'griot   Le Vi'griot Icon_minitimeMar 1 Juin 2021 - 16:51

ta langue bien pendue et venimeuse comme celle des
grenouilles
Akili se réveille enfin. Ses paupières vibrent pour peler la pellicule de sommeil enduite par la potion. Ses arcades sourcilières se froncent lorsqu’il se découvre dans une position inconfortable, les mains solidement nouées dans le dos. Il garde les yeux clos lorsque le souffle tiède de Trik’we recouvre son visage d’une voix basse.

« Tu voulais savoir pourquoi je t'ai bousculé, eh ? Tu as ta réponse. L’avertissement de ne pas nous sous-estimer, dit le zandalari, et il se penche un peu plus vers lui pour poursuivre dans un murmure. Mon amie t'a assommé. Il te reste encore à voir ce que moi et mon vaudou, on est capable de faire. Mais j'ai pas l'intention de te le montrer. Y a pas l'intérêt. Avec toi, je veux juste qu'on discute. » Le jeunot est loin de maîtriser son don comme sa fausse assurance le prétend. La conversation précédente sur son état général avec Moe’makani lui revient au visage. Si tu meurs, Trik'we, elle est perdue. Et ça, c'est une certitude. Si tu continues, tu vas mourir. Mais face au manque de moyens, il profite du brouillard étiré autour de la nature de sa clairvoyance pour gonfler sa fourrure et paraître plus menaçant qu’il ne l’est réellement. Cette stratégie ne sera pas gagnante : il veut surtout éviter d’exposer trop rapidement les failles de leur groupe à un troll encore loin du statut de l’allié. Cacher la fracture sous les poils hérissés.

Il perçoit les lèvres du drakkari remuer, lentement. Quelques sons en sortent pour se frotter à ses oreilles tendues sans qu’elles ne parviennent à les attraper. Il est partagé entre le diagnostique de l’état de semi-conscience et le lancement d’un mauvais sort. Alors sa main était déjà prête lorsque le sorcier redresse brusquement son buste pour refermer ses crocs sur ses mèches rosées.
« Toi, ta langue bien pendue et venimeuse comme celle des- » entonne Akili avant que la paume du chevaucheur ne se plaque avec force contre sa bouche pour l’empêcher de compléter l’incantation. Le drakkari le fixe droit dans les yeux, le nez froncé froissant le calme habituel de son visage dans une grimace de colère.
« Sois pas idiot ! clame Trik’we, les épaules tendues par ce tour de force. T'as été patient avec nous mais cette patience, tu l'as perdue au mauvais moment ! Mets-toi à notre place, comprends-nous comme nous on essaye de vous comprendre ! Mwan’ga nous traque pour tuer votre fa'da. Pour y parvenir, ton autre frère nous empoisonne juste après que j'ai eu la faiblesse de lui accorder ma confiance et ma sympathie. La malédiction de Shai'ri ..., et ses lèvres se tordent sous l'inquiétude sincère qui le ronge depuis une année entière, sa voix diminuant en hargne et allumant l’intérêt dans le regard d’Akili. Elle emporte son esprit loin. Dans un espace trop noir pour y voir et trop épais pour y penser, où moi je ne peux plus l'entendre résonner. Je ressens juste sa terreur et son épuisement. »
Sous sa main, l’aîné détend ses arcades au fur et à mesure que le flot de paroles s’écoule. Le chevaucheur songe à la vision trompeuse d’Iko, celle au croisement entre la vérité et le mensonge. La créature immense et la voix de Shai’ri hurlant son nom dans son ventre. Sans le savoir, il s’engouffre dans la route que le Vi’griot espérait le voir prendre.
« Elle lutte dans le corps d'une bête, pour ne pas en devenir une elle-même. Pour rester Shai'ri et ne plus jamais s'appeler la Senua que votre fa'da voulait qu'elle soit. Ca fait des semaines qu'elle se réveille plus. » Puis, sa mâchoire se contracte et ses griffes s’enfoncent légèrement dans la peau du troll des glaces, le marquant avec son ressentiment. « Pour une malédiction que TA famille lui a imposée ! Elle est sacrifiée sur l'autel des rêves fous d'un autre ! »
Akili souffle, secouant la tête sans le quitter du regard.
« Sachant tout ça, en te voyant, toi que je ne connais pas et qui fait partie de cette famille qui déchire la Shai'ri depuis si longtemps, à ma place t'aurais fait exactement pareil. Tu m'aimes pas parce que tu vois un zandalari. Mais si t'aime Shai'ri, la trollesse et non la drakkari, alors va falloir que t'apprennes à m'accepter moi aussi. »

Trik’we l'observe, détaillant son expression. Il cherche à déterminer si sa colère a évolué en un sentiment plus coopératif, sur ses gardes. Sous lui, Akili le fixe toujours. Son regard pétille d'une certaine rage, mais son visage semble plus détendu. Le chevaucheur serre les lèvres, signe qu’il est sur le point de prendre une décision incertaine.
« Si on veut sauver la Shai'ri, toi et moi il va falloir se faire confiance. Ne gâche pas cette porte que j'ouvre pour toi. »
A ces mots, sa main s’écarte lentement. L’autre ne change pas d’expression lorsqu’il avale le cheveu du jeunot.

« ...Grenouilles. »
« Sale c- ! »

Il n’a pas le temps de le maudire en retour, son corps entier se rétracte et ses os se tordent dans une position qui lui semble à la fois contre-nature et spontanée. La transformation est rapide et sans douleur.
« MONSIEUR TRIK'WE ! » crie Iko en se précipitant vers le petit amphibien à crête rose et aux sens troublés pour l’expérience. Trik’we peut voir dans toutes les directions à la fois et pourtant ne perçoit pas grand-chose hormis l’ombre d’Akili se redressant comme il peut pour mieux le toiser.
« Ça, c'est pour te montrer que moi non plus, on me sous-estime pas. »
Difficile de déterminer l’expression d’un batracien à houppette, mais le sifflement rauque que pousse celui-ci donne une idée de son humeur.  
« Qu'avez-vous fait ?! »
« Mais c'est pas tout, poursuit le troll sans s'attarder sur le vulpérin paniqué. Il connait l'histoire de la Grenouille qui voulait être un Mammouth ? »
Le canidé ramasse la pauvre petite créature pour la tenir fermement dans ses bras, conscient d'être devenu soudainement le protecteur du duo.
« Non et j'ai bien peur de ne pas vouloir savoir l'histoire et comment ça se termine ! », dit-il.
« Il fait bien, répond Akili sans sourire. Maintenant, c'est lui qui pose les questions. »

Trik’we s’appuie sur la fourrure rousse d’Iko pour projeter sa langue élastique dans l’œil du drakkari. La première réponse donnant le ton à l’interrogatoire qui les attend.  

 
Pando


Dernière édition par Trik'we le Ven 18 Juin 2021 - 2:07, édité 1 fois
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MessageSujet: Re: Le Vi'griot   Le Vi'griot Icon_minitimeDim 6 Juin 2021 - 18:40

Détruire quelque chose
en retour
Le chevaucheur n’a pas le temps de sentir son corps se déployer, comme une feuille compactée qu’on déplie, qu’il a déjà repris forme trolle. Il tombe à genoux dans la terre imbibée du rivage, la respiration courte mais pas à cause de la métamorphose. Entre ses mèches alourdies par l’eau, ses yeux meurtriers se plantent sur Akili. Moe’makani comprend que l'orage arrive. Il réceptionne de justesse la rage du zandalari en plein vol lorsque ce dernier se projette sur le drakkari. Ses bras se glissent sous ses aisselles et il le verrouille fermement en place. L’autre se débat, force sur la prise pour s’en défaire, cherche à libérer l’expression de sa colère.

« Trik'we ! souffle le pa’kurani, la mâchoire compressée par la lutte. Ça ne va servir strictement à rien ! »

Mais Trik’we ne le faisait pas pour servir une cause. Il ne le faisait pas pour aider. Non. Il se déchainait pour nulle autre personne que lui-même. Pour une fois, il choisissait l’égoïsme. Pour cette année entière passée à chanter un air sécurisant par-dessus les notes angoissantes de la malédiction. A rassurer Shai’ri, lui assurer qu’ils allaient la sortir de là alors qu’il n’avait aucune idée de la profondeur du gouffre dans lequel on l’avait jetée. A garder un rythme d’ascension soutenu et engageant, inspirant une danse, sans jamais être certain de la direction à prendre. A ne pas s’autoriser à craindre la coupure des prises glissantes car ses préoccupations étaient bien minimes face à l’enjeu qu’elle supportait bravement. Cette année à déjouer les mauvais sorts qui tordaient le corps et l’âme de la drakkari pour la monter contre lui, lui prêter le masque d’un ennemi. A jamais se plaindre de ses poussées de psychose car personne ici n’y pouvait rien, à commencer par elle. Pour toutes ces nuits où on l’a arraché à son corps pour l'égarer dans un espace où le temps n’existait pas. Ces journées sans heures à partager encore et encore la lente agonie des esprits zandalaris piégés dans l’Arbre du maléficeur. A vivre leurs morts comme s’il s’agissait de la sienne. A entendre celle-ci gémir qu’elle avait assez vécu et qu’elle demandait juste se laisser partir, celui-ci lui souffler une euphorie douloureuse pour le contraindre au jeu infini, celui-là hurler qu’il voulait vivre plus longtemps pour prouver à l’Empire qu’il valait plus que ce crâne vide coincé entre les racines noueuses, celle-là le tirer par son essence vitale pour qu’il ne parte pas avant de l’avoir ramenée auprès de ses parents. Et puis toutes ces monstrueuses âmes qui n’ont plus rien de troll en elles, lambeaux vidés de toute pensée où il ne reste plus que le besoin affamé de combler des manques insensés. Il faisait ça pour son mojo parasité, pour l’incertitude de la frontière séparant sa volonté de celle d’Uon’go et ses émotions intimes qui ne lui appartiennent plus. Pour ses souvenirs cousus aux siens, tiraillés entre le doré de Dazar’alor et l’albe de Zul’drak. Toutes les fois où il se surprend à l'appeler fa'da. Le supplice quotidien de devoir l’entendre décrire en détail ses propres échecs qui finiront par le mener aux bouts de lui qui l’attendent de l’Autre Côté. Ce besoin destructeur de les revoir, les sentir à nouveau vibrer en lui. Le voir utiliser leurs voix et leurs visages contre lui, les déformer par la souffrance et la supplication lorsqu’il ose lui désobéir. Et surtout ne rien dire pour n’inquiéter personne. Ne pas attirer l’attention sur ses propres plaies qui prennent forme. Il faisait ça pour ces soirées secouées par la fièvre délirante du poison de Woga, à ouvrir sa conscience sur l’expression préoccupée de Wa’ai avant de la perdre à nouveau dans le brouillard des visions. A sentir la magie du Makoa Loa le retenir du bout des doigts fatigués de la Prêtresse. Pour qu’il reste chez lui, qu’il ne parte pas par-delà le voile de la vie. Et malgré tout ça, avancer. Continuer de progresser sans jamais s’arrêter. Sans jamais reprendre son souffle car leur survie n’a pas ce temps-là à perdre. Il songe à l’âme de Shai’ri, inaccessible, qu’il perçoit diminuer peu à peu, emportant avec elle une part de lui qu’il ne pourra jamais récupérer car elle lui appartient pour toujours. Il la sent mourir et ses crocs et ses griffes veulent tout déchirer pour que ça n’arrive jamais.

C’est un transport instinctif, dicté par la frénésie ancestrale qui lui brûle les veines et fume sa raison. Il veut le tuer pour nulle autre raison que parce qu’il l’a blessé et qu’il veut enfin détruire quelque chose en retour. Le maléficeur doit être satisfait de sa contamination. Ça a demandé de la patience, mais il a finalement réussi à briser sa répugnante civilité propre aux zandalaris pour lui rendre sa sauvagerie naturelle.

« LACHE MOI ! » Le chevaucheur s’époumone et projette son coude à répétition dans le ventre de Moe’makani, jusqu’à lui fracturer les côtes s’il le faut.
« Si je te lâche, tu risques de le regretter Trik'we ! »
« C'EST LUI QUI VA REGRETTER ! CETTE FAMILLE ME PREND TOUT ! TOUT ! LA, C'EST ENTRE LUI ET MOI ! »
Il n’est pas assez lucide pour savoir comment il est parvenu à se libérer. Il se voit juste soudainement au-dessus d’Akili qui continue de ramper jusqu’à son bâton-tiki. Son pied s’enfonce dans son dos pour le plaquer face contre terre et le sorcier grogne de surprise.
« Non ! Monsieur Trik'we ! »
Iko tente de saisir le bras qui s’approche du manche de son arme, mais le troll le repousse d’un mouvement circulaire brutale, focalisé sur sa proie et n’entendant plus rien d’autre que la fureur animale qui le fait écumer.
« T’aimais pas ma langue pendante, eh ? »
Il fait tournoyer son poignard autour de son doigt avant de l’immobiliser dans une prise ferme.
« Je vais t’en montrer une aiguisée qui te conviendra mieux ! »
« Arrêtez ça ! Par pitié ! Il a une femme et un fils ! » supplie le vulpérin, mais la lame file dans un sifflement métallique vers l’œil du drakkari qui hurle un nom inconnu.

« SIM’BI ! »

Au loin, les yeux du bâton reptilien brillent. Et alors que le chevaucheur soulève son surin au-dessus de sa tête, un serpent aqueux jaillit hors du point d’eau. La bête spirituelle s’enroule autour de lui et le tire brutalement vers le lac. Le poignard râcle la terre humide et le zandalari a juste le temps d’entendre le cri paniqué d’Iko avant d’être happé par les tréfonds. Sa tempe doit s’être cognée contre la roche tapissant le sol aquatique car il se sent léviter. La pression du Loa se relâche mais il a perdu le réflexe immédiat de remonter. Moe’makani le saisit par le bras et la toux du jeunot éclate en même temps que la surface de l’eau. Le pa’kurani le traine vers le rivage, le petit renard précipitant ses inquiétudes vers eux.
« S'il vous plaît, monsieur Trik'we ! Reprenez votre calme et essayez de vous écouter l'un et l'autre une bonne fois pour toute ! Je lui ai parlé de ma vision ! »
Le parle-esprit jette un regard noir vers Akili. Il se tient à nouveau sur ses pieds mais ne se jette pas pour autant sur lui. Moe’makani comprend pourquoi à la façon dont il s’appuie pour lui confier une partie de son poids. Il a sondé son esprit quelques jours plus tôt et connait son état réel derrière les façades. Il est malade. Trik’we doit s’économiser mais ce n’est pas une sagesse qui trouve écho dans un caractère impatient.
« T'as perdu la confiance que je t'ai donnée deux fois ! tonne-t-il. Si tu veux qu'on t'aide, maintenant c'est toi qui vas devoir ouvrir une porte en espérant qu'on te la claque pas au nez ! »
Le drakkari attaché se traîne toujours vers son bâton sans daigner le regarder. Alors Trik’we s’avance vers l’arme reptilienne reposant plus loin avec du tonnerre dans le crâne.
« Monsieur Trik'we ! » s’alarme Iko.
Le sorcier gronde.
« Moi, je t'aiderais pas toi. »
« Comme je t'aiderai pas toi, répond le chevaucheur en ramassant le tiki. Seulement Shai'ri compte. »
Il pivote vers Akili et plante dans le sol meuble les trois griffes au bout de la relique. L’autre relève son regard placide.
« Ma confiance, tu l'auras pas. Tu l'as eu une fois. » soufflet-il.
« Tu ne me l'as jamais donnée, ta confiance. Et je n'ai rien fait pour la perdre. » Le chevaucheur plisse ses yeux foudroyants. « Toi tu as essayé d'emporter Shai'ri loin de moi alors que je t'ai tendu la main en t'emmenant la voir. Tu me maléficies alors que je tends mon autre main pour ouvrir un dialogue avec toi. Des mains j'en ai deux, pas trois ! »
« Moi, tout ce que j'ai vu, c'est ma soeur ligotée et inconsciente. Rien ne me prouve que vous l'avez pas enlevée. »
« ELLE ETAIT LIGOTEE POUR SA PROPRE PROTECTION, IDIOT ! fulmine le jeune et le troll des glaces le fustige de ses iris violets. Parce que les visions de votre fichue malédiction familiale, ça la faisait délirer ! Elle sortait de la sécurité de la hutte ! Attaquait ses propres amis ! Se perdait sur une route qu'elle pouvait plus voir ! »
« Et si ça, il lui avait expliqué avant d'emmener la voir ?! »
« T'avais pas ma confiance pour ça ! Et maintenant, je vois que j'avais bien raison d'hésiter à te la donner ! »
« FERMEZ-LA ! »

Iko a fini par craquer sous la tension lui aussi, balançant son chapeau chiffonné au sol. Le zandalari tourne son expression furieuse dans sa direction mais Moe’makani s’avance pour s’assurer qu’il ne tentera rien de stupide. Le chevaucheur plaque le bâton contre son torse pour toute réponse. S’il y a bel et bien le pouvoir sacré d’un Loa qui circule entre les stries de ce bois, il valait mieux éloigner la relique des pulsions qui lui commandent de la briser en deux. Le petit vulpérin prend alors la parole, à bout de nerf.

« Vous n'avez ni raison et tort ! Vous êtes DEUX à vouloir protéger madame Shai'ri ! Et vous êtes deux à vous comporter comme des gamins en vous charcutant pour savoir qui va mieux s'occuper d'elle comme si c'était une... une poupée ! »
La mention de l’indépendance de sa compagne fait mouche chez le jeunot, ramenant un brin de raison dans l’incendie qui brûle ses pensées.
« C'est Métti qui a du avoir l’idée que Shai'ri déciderait ! poursuit le renard. Je pense que vous n'avez aucune mauvaise intention mais que dirait Shai’ri si vous vous tapez dessus ?! Vous allez vous battre juste pour ça ?! Imaginez les conséquences si vous vous entretuez, comment se sentirait-elle d'après vous ?! Coupable surement de vous voir vous déchirer comme des hyènes qui se partageraient un vulgaire steak ! »
Trik’we serre les lèvres. Il détache lentement ses yeux d’Iko pour fixer Akili qui continue de ramper vers eux.
« L'un n'a pas eu confiance en l'autre, d'accord ! L'autre s'est précipité et a envoyé bouler tout le monde, d'accord ! Est-ce qu'on a envie de laisser deux grands bourrins se massacrer pour aider quelqu'un pour autant ?! »  Et puis le vulpérin a la phrase de trop. « Alors gardez vos distances ou collaborez mais Shai'ri sera plus en sécurité loin de vous deux puisque c'est comme ça ! »
Ces derniers mots ont l’effet d’une décharge débilitante. Trik'we arrondit son regard. Il imagine l’esprit de la drakkari continuer de disparaitre hors de sa portée. Il revoit l’explosion du port de Dazar’alor depuis les marécages de Nazmir. Sa propre incapacité lui revient en pleine face. Et son sang ne fait qu’un tour pour renvoyer la balle. Il plaque ses oreilles en arrière et saisit Iko par sa tunique pour le décoller du sol.
« Toi, tu rentres dans son esprit comme si son temple était un marcher ambulant dans lequel tu vas farfouiller ce que tu veux en balançant quelques pièces sur ton passage ! Si y'a bien quelqu'un avec qui elle n'est pas en sécurité, c'est avec un inconscient comme toi ! »
« TRIK'WE, CA SUFFIT ! »
Moe’makani se précipite vers lui pour le faire lâcher prise. Le parle-esprit n’a plus la même énergie qu’au début de la querelle et si sa colère le galvanisait auparavant, maintenant elle l’épuise. Il brûle les dernières gouttes de mojo souillé de sa réserve et est forcé de reculer en balançant son pied dans l’eau pour éclabousser le renard.

Leurs esprits continuent de s’échauffer pendant un moment. S’hérisser de piques aussi bien pour la protection que l’agression. Accuser et réfuter sans réfléchir. Le pa’kurani regarde le trollion optimiste qu’il a vu grandir sur les plages de Zandalar s’éreinter aujourd’hui à battre frénétiquement des ailes, les yeux fermés pour ne pas admettre qu’il chute au lieu de voler. Qu’il doit sauver son âme-sœur mais qu’en ce moment, c’est lui qui a besoin d’aide. Il ne le reconnait plus lorsqu’il l’entend répéter froidement les leçons de Nefterys. Il sent son mojo aplati et glacé par la mort lui noircir les idées. Alors il glisse une main dans son sac pour en sortir une fiole.

« Tu prends ça et tu vas dormir. »

 
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MessageSujet: Re: Le Vi'griot   Le Vi'griot Icon_minitimeLun 14 Juin 2021 - 16:42

toi, tu poses toujours trop de
questions
Des griffes glacées, familières à sa perception, s’enfoncent dans son essence pour le ramener lentement derrière ses limites. Le corps arrosé par son esprit renoue goutte à goutte son contact intime. Et il retombe dans la source de son existence. Ses paupières vibrent fébrilement pour secouer ses sens ruisselants de torpeur. Sa jambe se replie, ses nerfs y sentant encore la marque mordante des échardes gelées. Il comprend qu’il se tient en équilibre sur la fine frontière séparant tangible et intangible lorsqu’il aperçoit la couche de neige qui surplombe l'herbe dorée par la sécheresse du paysage dans lequel il s'est endormi.

« Y'a rien de bon là-bas, non non. »

La présence d’Uon’go ne surprend pas Trik’we, comme si cette conversation avait débuté depuis un moment. Continuité d’un échange sans ponctuation. Le maléficieur observe le zandalari avec ses iris clairs perdus dans le creux noir de deux orbites morts.
« Ton âme, elle se déchire. » constate-t-il de sa voix rocailleuse.
Le chevaucheur tient toujours fermement Shai’ri dans ses bras. Allongé auprès d’elle, il détaille les expressions éteintes de son visage en espérant y lire les paroles que sa bouche ne peut plus lui confier. Mais il ne fait face qu’à une paisibilité sépulcrale que ses doigts tentent de fleurir avec leurs caresses pour y déposer un peu de vie.
« Elle m’appelle, souffle-t-il. Elle a besoin de moi. »
« Ça, c'est ce que toi tu crois. Qu'elle t'appelle. » Chaque mot du drakkari poursuit sa palpitation phonique dans ses pensées et le froid devenu manteau lénitif recouvre doucement l’anatomie du jeune parle-esprit, laissant perler et scintiller un peu de givre sur sa peau nue. « Alors, toi tu te craques, comme si juste un peu de toi pourrait la secourir elle. »
« Je l'entend .... hurler mon nom, insistent les chuchotements du troll. Pour que je vienne jusqu'à elle. »

Le drakkari esquisse un sourire presque rassurant, mais son regard ne transmet pas la même bienveillance. Trik’we sent le frimas cristalliser une tranquillité narcotique en lui. On prépare son esprit pour l’hibernation à venir. Il repousse cette subjugation sous-jacente à chaque échange avec le maléficieur et secoue sa conscience encore somnolente. Derrière lui, il n’a pas besoin de se retourner pour discerner Uon’go qui se rapproche.
« Non, non... Elle ne t'appelle pas. Moi, je sens ce qu'elle veut. Mh, oui..., dit-il, soulevant une main de façon à ce que sa griffe pointe le jeunot qui se redresse. Ce que toi tu sens, c'est bien son âme à elle. Ça tu as raison. Mais ce n’est pas elle qui te réclame, non. Elle, elle veut seulement te rassurer. Te dire qu’elle est toujours là. »
Le zandalari fléchit ses oreilles. Tu te sens bien parce que tu veux aller plus loin. Mais il ne faut pas, tes ressources, elles sont trop basses. Laisse-toi quelques jours de repos Trik'we. Préserver ton esprit et ton corps. Après ça, tu pourras à nouveau voler. J'aimerai que tu puisses te sentir rassuré et apaisé quand on te dit que ça y'est, tu peux reprendre haleine et laisser quelqu'un prendre les rênes pour toi. Son regard tombe sur le visage de la trollesse qu'il libère de ses mèches blanches avec la délicatesse de son pouce.
« .... C'est pas moi qui la sauve mais elle qui me sauve, eh ? » murmure-t-il, comprenant enfin.
Uon’go continue de le surplomber.
« Toi... comme ça, tu pourras rien faire. L'âme, elle doit être solide. » Son index pivote pour désigner la drakkari, l’air grave.

« C'est le Vi'griot. »

Le regard surpris de Trik’we escalade la silhouette décharnée du maléficieur.
« Le Vi'griot ? »
L’autre garde son doigt pointé en direction de la trollesse et fronce son nez. Dans le mouvement, ses babines se retroussent pour dévoiler des crocs roussis comme ses défenses.  
« Lui, il traque. Les rêves, les cauchemars et le sommeil, ça, c'est son terrain de chasse, explique-t-il en se penchant, la pointe de son ongle décalant la chevelure ondulée de sa fille. D'abord, il attire. Que l'esprit, il ne sorte plus du monde des songes. Et ensuite, il chasse. Il chasse pour ronger l'âme. »
Trik’we est figé. Ses yeux se ferment, la vision qu’il imagine trop douloureuse pour ne pas chercher à l’étouffer derrière le noir de ses paupières. Akili disait vrai. Sa mâchoire est la première à se compresser dans un grondement ne produisant aucun son.
« Pourquoi Mwan'ga a lâché cette bête sur Shai'ri ? », s’hérisse-t-il.
Le maléficieur pose ses iris glacials sur Trik'we avant de revenir observer la trollesse.
« Personne il contrôle le Vi'griot. Mwan'ga, c'est moi qu'il cherche. Mais Vi'griot, c'est elle qu'il cherche. Lui, il abandonne jamais sa chasse tant que sa proie, il l'a pas dévorée. Et Mwan'ga... Le vévé qui contient Vi'griot, il l'a en sa possession. »
Il retire son doigt griffu de la crinière de la trollesse et le chevaucheur secoue la tête dans un refus de cette réalité qu’on lui présente. Ses lèvres se serrent. Se compressent, même. Les crocs apparents.
« Qu'il lui parle de ce vévé. Mwan'ga, pour sauver l'âme de Shai'ri il tracerait ce symbole autour d’elle ? grince-t-il tandis que son regard lourd de sens se soulève vers le sorcier. Ou alors il demanderait une contrepartie. »
Ne cherchait-il pas son fa'da après tout ? La coïncidence d'un possible échange, elle contre lui, était bien trop arrangeante pour Mwan'ga pour qu'elle ne soit que le fruit du hasard. Uon’go revient un instant contempler le zandalari. Il se plait à lui trouver un air plus sauvage que civilisé et sa bouche étire une ride de satisfaction à peine visible. Lentement, la fine couche de neige fond. Le drakkari garde ses yeux perçants dans ceux du chevaucheur, hésitant. Il relève finalement sa main pour l’inviter.
« Mh, oui oui, approche-toi. Approche-toi et tu sauras. » déclare-t-il, ses lèvres se rebiquant dans un sourire. Trik’we ignore si c’est à cause de ses intentions cachées ou d’une physionomie naturellement menaçante, mais il lui trouve des airs carnassiers.
« Tu vas en profiter pour étendre ton mojo en moi. » dit-il comme s’il énoncerait une évidence.
L’autre le fixe longuement, gardant sa griffe tendue.
« Pas ce soir, mh, non non... Ton âme mourante, elle ne me servirait à rien. »
Le parle-esprit n’a pas le temps de se poser davantage de questions, il se voit déjà assis face à lui. Il a le sentiment de condamner quelque chose mais son mojo malade le plonge dans un calme et une acceptation effroyable. Son regard vert s’enfonce dans le sien.
« Pourquoi … tu as besoin d'âmes zandalari ? » parvient-t-il à demander.
Le maléficieur fronce son nez.
« Toi, tu poses toujours trop de questions. »

Doucement, il vient appuyer la pointe de sa griffe contre son front. Un souffle froid s’engouffre en son centre et la conscience du petit zandalari disparait dans un éclair blanc.

 
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MessageSujet: Re: Le Vi'griot   Le Vi'griot Icon_minitimeJeu 17 Juin 2021 - 21:00

couvrir une blessure qui ne se referme
jamais
Des corps sont étalés sur le drap de neige. Le jour s'est levé et le soleil lape lentement les cadavres gelés des trolls qui ont perdu vie il y'a de cela de nombreux jours. Il s'avance dans la poudreuse épaisse pour découvrir les restes d'un vieux drakkari, déjà en parti enseveli par le froid du Norfendre. Le Vi'griot, il n'a pas seulement tué... La main blanche d’Uon’go soulève l'une des chapes du vieillard, dévoilant un grigri en forme de main griffue. Brisé. Un oeil est gravé dans le bois. Mais ça, ce soir ça te sera pas utile de le savoir… Il dépose respectueusement une pierre brune sur le poitrail du défunt avant de ramasser l’amulette émiettée pour la serrer dans sa main. Wom'ba, il était le premier à détenir le grigri qui enfermait le Vi'griot. Le Wom'ba, il était un grand prêtre. Sa puissance, il en avait usé beaucoup pour pouvoir forcer le Vi'griot à rentrer dans sa prison de bois, il y'a très longtemps, mh. Moi, j'espérais que son âme elle serait récompensée justement. Mais les drakkaris, nous, on est maudit. Aux yeux des autres et aux yeux des Loas aussi… Il s'éloigne et le blizzard s'intensifie, ne laissant que quelques silhouettes visibles en son cœur. Alors, le rituel de la Pierre, il a servi à rien. La Pierre, elle a jamais blanchi et Wom'ba, il a jamais été en paix pour ce qu'il avait fait.

Doucement, la vision s'éclaire sur une bougie qui tremble devant un bol de pin où est contenu du sang. Plusieurs drakkaris sont là, sur les pierres grises des premières marches de Zul’drak. Il reconnaît Zo'kar, Akili, Nyeusi, Woga, Mwan'ga et le visage d’autres trolls déjà perçus mais pour autant inconnus. Shai'ri est là elle aussi, endormie contre l'épaule du jeune redoutable. Le Fléau, il a emporté beaucoup d'âmes. Mais il a aussi ébranlé la fierté et la confiance de beaucoup de drakkaris. Alors, la peur, elle grattait leurs ventres pour les submerger… Mwan'ga le fixe, ses iris clairs crachant toute la colère qu'il retient dans ses mots et son expression. Mh, oui, moi aussi, j'avais peur… Leurs traits sont concentrés, le regard dirigé vers la bougie. Tous sauf celui de l'aîné qui dévisage son père. Moi, j'avais peur pour moi. Et pour eux aussi. Peur de les voir disparaitre. Mais la peur, ça non, on ne doit pas la transmettre. Mais on peut la faire entendre pour des raisons que l'on croit juste… Des quelques paroles trop basses pour être comprises, la voix grondante de Mwan’ga émerge.
« M'ti et Mv'ua, ils sont partis avec le Malakk. Il va les suivre. Il va se battre avec eux. »
Le troll transmet sa détermination dans son expression, sa crinière bleutée balayée par le vent frais du nord. Uon’go lui répond avec son calme.
« Moi, mon temps, il est compté. Mh, quand moi, je partirai, toi, tu devras prendre la relève, dit-il en affrontant le regard sombre de son premier fils sans bouger. M'ti et Mv'ua, ils ont fait leurs choix. Toi, tu peux encore rester. »
Nyeusi et Zo'kar se tourne vers l’échange. Mon choix à moi, il est devenu le sien à lui. Mwan'ga, il croyait suffisamment en ses fils pour les voir revenir un jour. Moi aussi, j'y croyais.

Il avance en direction du deuxième palier de Zul’drak dans un paysage placide. Le Vi'griot, il est comme de la brume. On sait qu'il est revenu seulement quand il frappe... Son pied heurte quelque chose et son regard se baisse sur un casque en acier. Se faire ronger l'âme,  c'est quelque chose de plus douloureux que de se faire dévorer le corps. Parce que c'est plus long... Il ramasse lentement le heaume et pousse la poussière de neige qui trône dessus. Alors, malgré la douleur qui nous accablait, on se soulageait en pensant que certains, ils tomberaient jamais entre ses griffes... Son regard se relève sur le corps d'un trollion qui semble endormi contre la roche froide. Il dépose le casque trop grand sur sa tête et continue son chemin.

Il se tient devant une pierre et ses doigts, recouverts de sang, trace avec précision un signe drakkari contre la paroi. Des pas dans la neige se font entendre et il se tourne pour apercevoir la trollesse à l'immense crinière brune s'avancer, tenant un enfant en parti enveloppé par la fourrure dans ses bras. Seyolo, la compagne d’Akili, et leur fils.
« Le Jabu.. Il se réveille plus… » gémi-t-elle.
Le maléficieur abandonne ses symboles, comprenant. Mais d'autres, ils ont pas eu cette chance. Le Vi'griot, il devait aimer s'attaquer d'abord au plus jeunes d'entre nous. Njiwa, elle disait toujours que les petits, ils ont la tête pleine de contes et leur imagination, elle est sans limite. Mh, oui, moi je crois que Vi'griot, ça lui plaisait beaucoup de chasser dans ces terrains-là.

Il n'y a que la mélodie des pleurs et de la hargne qui s'élève dans un décor nocturne. Lentement, la lumière revit et c'est le visage décomposé d’Akili qui se dévoile en premier plan, le jeune Jabu allongé sur le linceul de fourrure. Nyeusi continue de passer ses mains au-dessus d'une deuxième torche éteinte, et son embout recouvert de tissu crépite pour prendre feu. Mwan'ga et Uon’go s'entaillent chacun la main pour recouvrir le ventre du trollion de sang, traçant un symbole sur son torse et son ventre en psalmodiant des incantations. Seyolo est absente de la vision, mais son cri déchirant accompagne les prières des deux maléficieurs. Dans le fond, des drakkaris reprennent le chant et les adjurations. Un troll à la petite crinière mais à la fourrure hirsute au niveau de la mâchoire trempe ses doigts dans un bol pour s'en couvrir les bouts comme des pinceaux. Ça doit être Sa’hau. Il dessine avec la mixture blanche un masque en forme de crâne sur le visage de l'enfant. Akili se penche et enlace le corps inerte. L'âme du Jabu, le Vi'griot il l'avait rongée. Ça a mis longtemps. Nos visages, ils montraient rien, mais nous aussi on était rongé. Mais pas par le Vi'griot. C'est une bête qu'il est impossible de combattre qui nous consumait tous… La main pâle d’Uongo vient se saisir des phalanges fermées du petit pour les glisser sur son ventre. Le Vi'griot, il doit aimer nous faire grimacer. Quand l'âme du Jabu, elle se faisait manger, son corps il avait mal aussi. Mais lorsque le Mwan'ga, il a retrouvé la pierre gravée du Wom'ba, c'était trop tard… Il vient se saisir de l'autre main et la place sur le torse. La mort de l'un, moi je pense que c'est aussi un peu la mort des autres. Mais c'est la tristesse qui dévore la vie. Et ça, je l'ai vu dans le regard de l'Akili.

Il fait sombre, plus sombre que précédemment. La nuit doit avoir avancé. La main du vieux drakkari attrape la fourrure brune qui est refermée sur le cadavre de l'enfant. Et il l'ouvre. Moi j'ai pas pu faire ça pour Tez'o et Man'jano. Mais perdre encore ce que j'ai construit, je voulais plus… Le cri d'un animal, un ours, gronde dans la pénombre. Le voile se relève et la main d’Uon’go est posée sur le visage de l'enfant allongé, couvert d’un liquide vermeil et de symboles gravés à la griffe sur son torse. Ses doigts s’écartent et, lentement, découvrent les yeux ouverts du trollion, le scintillement de la bougie offrant elle seule un peu de vie dans son regard. Il est loin, mais il peut voir le corps de Jabu errer sans but, attaché par des chaînes à sa mère. Les pupilles d'Akili brillent d'espérance et il a repris un visage calme. C'était comme couvrir une blessure qui ne se referme jamais. Mais le Vi'griot, il n'en avait pas fini. Sa faim, nous on aurait même pu la penser insatiable. Seulement cette fois, nous, on était prêt à l'affronter une deuxième fois.

Les restes d’un temple les entourent. Ils se tiennent à nouveau au milieu, Nyeusi allumant cette fois-ci quatre torches, comme si la lumière qui brasillait pouvait leur apporter plus d'énergie qu'ils ne pouvaient avoir. Uon'go s'entaille une nouvelle fois la main et serre son poing pour laisser son sang tomber goutte par goutte sur la peau bleutée de l'enfant qui est déposée, elle aussi inerte, sur la fourrure brune. Sa'hau plonge encore ses doigts dans le bol en bois et les ressort pour dessiner un crâne rougeâtre sur son visage, contournant habilement les petits sourcils qui surplombent ses cils noirs de trollionne. Mwan'ga trace avec son sang un symbole drakkari sur le torse nu de la petite et Akili, le visage fermé, s'interdisant toute émotion, place un index de chaque côté de ses tempes. Les détails changés sont minimes mais les cœurs sont gonflés d'espoir. Dans le fond, Woga commence une lente litanie que continue Uon'go, rapidement rejoint par d'autres drakkaris. Quand Vi'griot il a attrapé le petit Jabu, nous, on était dévoré par la peur. On se sentait démuni face à un mal qu'on devait affronter pour la première fois... Mwan'ga glisse doucement un grigri en bois sur le torse de la jeune endormie trop profondément, le vévé en forme d'œil gravé expertement. Mais quand les songes intenses ils ont pris la Shai'ri, nous on était certain d'avoir une chance de gagner... Les heures passent et les trolls enchainent entre prières et danses, le drakkari à petite crête humidifiant la peinture faciale à chaque fois que celle-ci sèche. Akili semble exténué, le teint blême, mais conserve les yeux clos et son air impassible. Mwan'ga, les mains ensanglantées, relève lentement l’amulette. Derrière lui, deux torches se sont éteintes. Le vévé brille d'une aura noirâtre et le maléficieur se relève lentement pour s'éloigner et s'enfoncer dans l’obscurité. Ses mouvements sont lents et assurés, mais Uon'go sait qu'il est au bord de l'épuisement, luttant contre l'entité qui cherche à s’échapper. Moi, je n'en avais plus la force. Relever le Jabu a fait comme un trou profond dans ma puissance. Et le Vi'griot, il s'en est pris trop rapidement à elle.

Les torches s'éteignent et se rallument pour éclairer la vision à nouveau, Shai’ri tournant et retournant un oiseau en bois, peinturé de bleu. Mais le Wom'ba, il avait passé presque la totalité de mes saisons à contenir le Vi'griot avec sa force et son expérience. Mwan'ga, il était pas un prêtre. Alors, parfois, le Vi'griot il venait gratter chez nous, voir si on avait des émotions à lui offrir… Le vieux maléficieur s'éloigne de Zul'drak, la trollionne accrochée à son dos. Il se tourne vers les silhouettes de ses fils qui les observent s'en aller sans un salut pour eux. Le maigre Velett reste dans le fond, presque invisible parmi ses frères. Mais il en manque un. Ce jour-là, moi, je m'attendais à voir Mwan'ga me regarder avec toute la haine qu'il pouvait, surement sur la pierre la plus haute des ruines de Zul'drak. Mais il était pas là. Moi, même si c'était un regard noir qu'il m'offrait, oui, j'aurais aimé le voir une dernière fois.

Trik’we est trop drainé pour en apprendre davantage. Alors Uon’go le laisse s’endormir, emporté par la sensation de plénitude.

 
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MessageSujet: Re: Le Vi'griot   Le Vi'griot Icon_minitimeJeu 22 Juil 2021 - 15:07

LETTRE DE TRIK'WE


Citation :
Wa’ai

J’aurai aimé te donner des nouvelles plus réjouissantes et pouvoir te dire que tout va bien. C’est ce que j’avais commencé à écrire dans ma première lettre mais quelque chose en moi, il savait que je ne parlais plus vrai. Que je me mets peut-être bien en danger en avançant vite avec les yeux bandés sur ce qu’il m’arrive. Alors je l’ai brûlée pour la recommencer. Au départ, je pensais que c’était les avertissements répétés de Moe’makani qui me montaient à la tête, à me dire que je vole hors des limites que mon corps et mon esprit ils peuvent me permettre. Quand je fais rien, la situation elle empire car la malédiction de Shai’ri, elle a pas la pitié d’attendre que je sois reposé pour continuer de progresser. Moi aussi il faut que j’avance et garde le rythme. J’ai pas l’impression d’être mourant. C’est ce que je me disais et je crois bien encore me le dire malgré tout. Mais après les évènements d’hier soir, je ne sais plus quoi penser. Je ne sais vraiment plus.

Je ne sais plus quelle pensée elle m’appartient et laquelle a été insérée par un autre. Je parle des conseils qui me sont donnés mais aussi d’Uon’go. Quelle est la limite entre ce que je ressens et ce qu’il me fait ressentir. Il baigne dans mon mojo et mes souvenirs et distille ses parts de lui en moi comme si j’étais juste une fichue tisane. Une potion dans laquelle on jette des ingrédients en attendant que le mélange fasse effet. Ça doit l’affecter lui aussi, car je sens ses émotions de moins en moins agressives à mon encontre. Maintenant il m’aide quand je le lui demande. Parfois, je sens qu’il me confond avec l’un de ses enfants et m’accorde le même traitement de faveur qu’un membre de sa famille. Il m’apprend beaucoup. Ça pourrait être une tromperie, mais ses émotions elles ne peuvent pas me mentir. Sa confusion non plus. Parfois, je sens son amour protecteur pour moi.

Je ne savais pas vers qui me tourner mais j’avais besoin de parler. Ecrire en l’occurrence. A quelqu’un qui pourrait comprendre ce qu’il m’arrive et les questions que je me pose sans chercher à m’imposer ses réponses. Je dois trouver ma propre sagesse, et toi Wa’ai tu as toujours su trouver les mots pour aiguiser ma boussole personnelle sans pointer directement l’horizon que tu vises toi. Tu me laisses pas me perdre, mais tu me laisses chercher. Je dois devenir sage, mais ta propre sagesse me manque. L’entendre ça me manque. Alors je crois que j’avais besoin de truquer mon esprit pour lui donner l’impression que tu pouvais me répondre quand j’écris tout sur cette page.

Je ne sais pas par où commencer, il se passe tellement de choses en si peu de temps. Je crois que je vais commencer par ce qui est le plus urgent pour vous et la sécurité de la hutte. Mwan’ga, l’aîné de la famille de Shai’ri, il veut se venger de son père et il a entrainé certains de ses frères avec lui. Ça maintenant, c’est une certitude. Uon’go, il se faisait vieux mais ses projets, ils étaient importants pour la survie des siens. Sa famille et aussi tous les trolls présents dans le coin reculé de Zul’drak où ils s’étaient isolés pour fuir les pas-morts. Alors il avait besoin qu’un de ses enfants, il assure la relève. Mwan’ga, c’était le plus âgé et il a continué d’apprendre à contre-cœur. Par devoir. Lui ce qu’il voulait, c’était partir sur l’Ile du Tonnerre avec ses deux fils pour défendre l’avenir des trolls. Aujourd’hui le mojo de Mwan’ga il est malade, l’espoir rongé par le Vi’griot dont il était le gardien, et ses fils je crois bien qu’ils sont morts pour les visions du Traitre Zul. Alors ses responsabilités, elles étaient plus suffisantes pour l’obliger à rester à la place qui lui a été désignée. Je ne sais pas ce qu’il a l’intention de faire à Shai’ri et Uon’go, mais il ne marche pas seul. Woga, Sa’hau et Velet, si des trolls portant ces noms s’approchent de la hutte méfiez-vous d’eux. Ils ont pu nous retrouver dans les Tarides grâce à une amulette ancienne de la grande ma’da Matu’mani, la ma’da de Uon’go. Je crois qu’elle a perdu sa fille dans une tempête de Norfendre et qu’elle avait peur que son fils subisse le même sort. Avec ses pouvoirs et son expérience de féticheuse, elle a confectionné un grigri à tête de serpent qui pointe en direction du mojo de Uon’go. L’amour de sa famille, il s’est retourné contre lui et donc contre nous. Ils ont vu qu’on se rendait souvent près de ta hutte, peut-être qu’ils y retourneront pour nous retrouver. Soyez sur vos gardes.

Je ne sais pas comment conduire cette lettre, je suis désolé si tu t’y perds un peu. J’ai trop de souvenirs en tête, plus que je devrai en avoir. Parfois, j’ai l’impression de déborder. D’avoir un trop plein de tout. De devenir fou. Je m’isole pour ne perturber personne au campement. Je plonge ma tête dans l’eau pour que Gral emporte mes secrets. Ne plus rien entendre du monde qui m’entoure, ça fait du bien. Juste moi, mon souffle offert par Pa’ku qui se libère en bulles et le silence de l’eau.

J’ai compris la nature de la malédiction de Shai’ri. Uon’go a accepté de me montrer dans nos visions partagées maintenant qu’il n’a plus d’autres choix et qu’il me fait confiance. On l’appelle le Vi’griot. Peut-être que vous avez déjà entendu parler de ce Loa ancien vous qui avez des oreilles tournées vers l’univers. Je ne sais pas encore tout de lui. Rien qu’avec les souvenirs qui m’ont été transmis, au campement ils avaient déjà fini le deuxième repas de la journée quand je me suis enfin réveillé. Uon’go, il ne me veut peut-être pas du bien, mais il ne souhaite pas ma mort non plus. Ou du moins pas tout de suite. Alors il m’a juste montré assez pour que je sois averti et qu’on puisse faire ce qu’il faut, mais pas trop pour éviter de m’affaiblir. Peut-être bien qu’après tout ça, Uon’go il va à nouveau essayer d’écraser mon esprit avec la force du sien, mais maintenant que Mwan’ga a quitté son poste il a besoin de mon aide comme moi j’ai besoin de la sienne.

Je sais pas comment le Vi’griot, il a été attiré dans les terres glacées. Mais je sais que déjà à l’époque, il avait rongé beaucoup d’âmes. Son terrain de chasse, c’est l’imagination. Alors il commence toujours par les trollions qui en ont une bien fertile avant de l’assécher en grandissant. Il tisse un rêve où on ne veut plus sortir. A force d’y retourner, ses griffes elles s’enfoncent plus profondément, comme les barreaux d’une cage qu’on plante. Puis après, on ne peut plus se réveiller. Il utilise la peur et le désespoir comme armes pour traquer parce que ce sont les émotions négatives qui le nourrissent, le rendent fort. Uon’go, il a dit que j’étais trop fatigué pour voir ce qu’il faisait vraiment aux âmes qu’il dévore. Je sais juste que c’est lent et cruel. Qu’il se concentre sur une proie avant de se glisser dans l’imagination d’une autre une fois qu’il ne reste plus rien à lécher et à grignoter. Un ancien prêtre drakkari, Wom’ba, il avait trouvé les vévés à tracer pour enfermer le Vi’griot dans un grigri. Il en était le gardien, son pouvoir, son expérience et les jours qu’ils lui restaient à vivre, il les mobilisait pour contenir le Loa maléfique. Quand Wom’ba est mort, la protection elle est partie avec lui. Tous pensaient que les Loas, ils avaient récompensé son sacrifice en repoussant le Vi’griot comme ils le demandaient dans leurs prières. Mais les drakkaris, ils sont maudits. Et le Loa maléfique, il a recommencé à manger les enfants des Grisonnes. Shai’ri, elle me parlait de certains de ses amis d’enfance. Tarak, elle disait qu’il était parti en repoussant bravement des pas-morts, que c’est ce qu’on lui avait raconté. Son cadavre déformé par le Vi’griot, Uon’go il ne m’a pas laissé le voir, mais j’ai reconnu le casque qu’il a posé sur lui lorsqu’il a compris qu’il ne se réveillerait plus. La mort imposée par le Vi’griot, elle est douloureuse, alors parfois ils mentaient aux plus petits pour les préserver de la vérité. Ça les cachait de leur propre peur aussi. Ils avaient perdu beaucoup de leurs trollions et un Prêtre talentueux et courageux comme Wom’ba, ça se reforge pas. Uon’go et ses fils âgés, ils cherchaient de nouveaux vévés pour que le Vi’griot plus jamais il sorte de sa prison. J’ai vu et senti son amour pour ses petits. Uon’go, il cherchait juste un moyen de sauver les siens. J’ai parlé d’eux comme des monstres. Quand j’y repense la honte me tord l’estomac. J’aurai voulu savoir tout ça depuis le début. Ne pas avoir tiré de conclusions aussi hâtivement. J’aurai voulu m’être tourné vers le Makoa Loa plus tôt. Je suis tellement désolé Wa’ai. Désolé d’avoir mis du temps à comprendre ce que tu voulais nous faire savoir.

Le rituel, il était pas prêt, mais quand c’était au tour de Shai’ri de ne plus se réveiller, ils ont refusé de perdre un membre de plus de leur famille et se sont mis au travail. J’ai vu tous les fils donner plus qu’ils ne pouvaient. Mwan’ga, mais aussi Woga, Sa’hau, Akili, Seyolo et même Nyeusi, le troll dévoué et brave que je n’aurai jamais dû tuer en Norfendre. Il veillait sur les sépultures de ses proches. Le petit frère de Shai’ri, Za’buni, il était enterré profondément dans la neige pas parce qu’il avait été abandonné, mais pour que le froid l’emprisonne dans la glace et que le Roi des Morts, il ne le relève pas. Il nous a attaqué parce que comme nous, il a eu peur pour ses proches. J’aurai aimé avoir eu le réflexe de tourner le manche et non la lame de mon poignard contre son crâne lorsque je l’ai frappé pour l’arrêter. Je ne savais pas et mon crime, ça a été de ne pas chercher à savoir avant d’agir. De ne pas avoir cherché à comprendre ces trolls qui étaient pourtant pas si différents de moi avant de les damner. Des frères d’une même grande famille aimée par un père unique.

Je me perds encore dans mon écrit, j’espère que tu arrives à me suivre.

Uon’go et ses fils, ils ont réussi à enfermer le Vi’griot dans un grigri à leur tour et ont laissé des marques sur le ventre de Shai’ri. Mwan’ga, il a été désigné comme gardien parce qu’il avait le plus appris et je l’ai vu s’enfoncer dans la nuit et le froid pour ne jamais revenir vers les siens. Il était prisonnier de son devoir et le Vi’griot, il ne l’a pas laissé en paix. Alors quand son esprit, il a commencé à faiblir, Uon’go il est parti à Zuldazar avec Shai’ri pour éloigner la bête de sa proie. Il espérait apporter un peu de répit à Mwan’ga. Peut-être revenir avec un nouveau rituel pour pouvoir se débarrasser du Loa. Shai’ri, elle était trop petite et avait peu de souvenir. Je crois bien que le Vi’griot, il altère sa mémoire pour transformer ses rêves en cauchemars. L’amour en haine. Mais peut être que c’est un nouveau rituel que Uon’go préparait dans son Arbre, que c’est pour ça qu’il capturait des zandalaris. Dans mon sommeil dans ta hutte, mes rêves ils étaient décousus, mais je me souviens l’avoir entendu dire à ses fils que les âmes zandalaris étaient précieuses, qu’il lui en faudrait beaucoup.

Savoir tout ça, ça excuse pas. Ca n’explique pas tout non plus. A Zuldazar, Uon’go j’ai bien senti qu’il y préparait plus qu’une cage pour le Vi’griot et qu’il avait des projets pour Shai’ri et sa progéniture. Ca explique pas non plus pourquoi il a cousu son mojo au mien.

Il faut que je me rappelle que je ne dois pas lui pardonner tout ça. Sinon il gagne. Il aura réussi à me faire oublier qui je suis et d’où je viens. A me perdre dans ses pensées, peurs et rêves à lui pour que je n’existe plus. Qu’Uon’go absorbe totalement Trik’we. Mais malgré ce danger-là, quand je me suis réveillé la première chose que j’ai ressenti, c’est la culpabilité de ne pas savoir. De ne pas m’être rendu compte. Tu ne pouvais pas me répondre lorsque je t’avais demandé comment c’était possible de ne pas souhaiter la mort d’un troll ennemi parce que je devais trouver ma propre réponse. Répéter les paroles d’une prêtresse comme un bon apprenti, c’est pas avoir la foi. Si je veux vraiment comprendre et me rapprocher du Makoa Loa, il faut que je crois en ses messages. Qu’ils deviennent mien.

Tu seras alors peut être contente d’apprendre que ma réponse, je pense qu’elle commence à se former dans ma tête. Il faut que j’apprenne l’humilité. Que j’accepte de ne pas tout savoir et que je ne serai jamais un bon juge pour ça. La mort, elle a beau être présentée comme une alliée naturelle, on lutte tous pour ne pas la voir venir. On l’utilise comme punition affreuse pour nos ennemis, aussi. C’est une malédiction qu’on ne peut pas défaire, alors il ne faut pas imposer ce châtiment à la légère, comme si on savait ce qu’on faisait. Parce que dans le fond, personne ne sait. Personne sait ce que Bwonsamdi cache si bien à ses disciples et personne sait quelle vie un troll qu’on condamne l’a mené jusqu’à s’opposer à nous. Drez’kan, mon premier frère, il avait raison. Un monstre, c’est rien de moins qu’un esprit protecteur qu’on a pas appris à aimer. Le combat et la guerre, c’est dans la nature des trolls. Mais les trolls aujourd’hui, ils sont en train de décliner. Alors faut faire ce qu’un troll fait encore mieux que tuer : survivre et s’adapter. C’est le monde actuel qui l’exige. Qu’on laisse les Loas juger qui mérite de mourir, car eux ils savent tout de nous, même ce qu’on se cache à nous même. Le Makoa Loa, il punira lui-même ses enfants qui le méritent. Mais en attendant son retour, les trolls ils doivent survivre.
Il faut que j’admettre que je ne peux pas tout savoir, mais pour autant il ne faut pas que je m’oublie. Il ne faut pas que j’oublie les âmes zandalaris prisonnières dans des crânes entre les racines de l’Arbre d’Uon’go. Il ne faut pas que j’oublie ses menaces et celles de Mwan’ga. Iko, l’ami de Métti, il dit qu’il voit le futur. Les Loas que nous prions, ils lui ont confié la vision de Mwan’ga faisant couler mon sang devant l’Arbre à Zuldazar. A moins que ce soit son sang à lui qu’il a vu couler ? Il faut que je les préserve de ma colère, mais il faut aussi que je vous préserve de la leur. Je ferai tout pour que ça n’arrive pas, mais si mon poignard doit se figer dans leur crâne, contrairement à Nyeusi ça sera parce qu’eux l’auront choisi et pas moi. Moi ce que je veux, c’est donner à chaque troll, chaque frère et chaque sœur, une chance. Juste une chance que tout le monde s’en sorte.

Shai’ri, elle ne se réveille plus. Le Vi’griot, il a fini par la capturer définitivement dans ses rêves. Mais j’abandonne pas. Personne abandonne. Pour lui faire gagner du temps, je vais lui transmettre ma joie et mon optimisme à travers notre lien. Lui parler tous les soirs, lui rappeler nos beaux souvenirs et l’aider à imaginer ceux qu’on doit encore construire. Comme ça le Vi’griot, il ne pourra pas la plonger dans le désespoir. Pour la sauver elle, mon propre bonheur est une nécessité. Il faut que je vive mes journées comme une fête. Il faut que je sois heureux. Ainsi, mon mojo qui vibre dans le sien, il lui donnera de quoi lutter.

La hutte me manque. Vous me manquez tous. J’espère que Sala’jin et les autres rentreront bientôt de leur voyage et que je pourrai les revoir. Je continue de prier Pa’ku et le Makoa avec les amulettes que je t’ai montrées pour qu’ils m’aident à trouver mon chemin. Le mien et pas celui d’un autre. Je veux que vous soyez fiers de ma progression. Du troll que je deviens. Que quelqu’un ici soit fier de moi.

Je reviens vite et je ramène Shai’ri avec moi, je te le promets. J’apporterai de belles histoires à raconter également, de quoi vous faire un peu sourire.

J’ai autre chose à te demander : je ne veux pas t’obliger à mentir aux autres mais je ne veux pas les inquiéter davantage pour autant. Ça a déjà été assez dur pour Jum’sha de prendre la décision de rester en arrière. Il faut qu’il s’occupe de son avenir à lui. Je vous cause déjà assez de soucis et je ne veux plus vous voir en danger par ma faute. Dis leur juste que je fais tout ce qu’il faut pour rentrer. Qu’on est tous en vie alors que tout va bien, qu’on fait notre possible pour réussir. Ça ne sera pas un mensonge.

Prends soin de toi.

Di’chuka Pa’ku.
Di’chuka Makoa Loa.


LETTRE DE WA'AI


Citation :
A Trik'we des Zandalari,
Au campement vulpérin de Iko
Azshara


Merci pour ta lettre. Avoir de tes nouvelles, même si elles ne sont pas rassurantes, c'est important. Et je pense l'inverse est vrai aussi. Sache que Sala'jin, Ta'ka, Wa'dip et Hel'kalna sont de retour à la hutte. Ils se portent tous bien, malgré des pertes matérielles et de la déception. Leurs attentes et leur ténacité n'ont pas été récompensées. A présent que je n'ai plus à me faire du soucis pour eux, tous les jours mes prières sont entièrement tournées vers Shai'ri et toi dans l'espoir que le regard du loa oublié se pose sur vous et vous apporte le soutien dont vous avez besoin.

Métti est passée récemment nous voir, alors peut-être t'a-t-elle déjà informée de leur retour. Elle m'a aussi confié que Shai'ri était réveillée, ce qui m'a beaucoup réconfortée car dans ta lettre elle était toujours plongée dans un sommeil profond. Le Mal dont elle est atteinte semble être puissant et dépasse les limites de ma savance. Je le savais depuis longtemps, depuis la première fois où j'ai tenté de le lui retirer. Tout comme pour toi par la suite, j'ai compris en voulant aider que le pouvoir résiduel de notre Père que je cultive et peux canaliser ne serait capable que de vous retenir vers la vie par un fil ténu, sans pouvoir soigner définitivement. Que cela ne donnait que l'illusion d'une aide, mais très temporaire, presque inutile, comme essayer d'éteindre un volcan avec des sceaux d'eaux.

J'ai bien noté les noms des trolls que tu m'as donné et reste vigilante sur tous ceux qui se présentent à nous. Pour le moment je pense qu'aucun de ceux qui sont venus à la hutte n'était un troll des glaces, même sous un faux nom. La décision de vous écarter pour protéger le reste de notre communauté elle n'a pas été facile, mais je peux dire à défaut d'autre chose qu'elle a été efficace et que les autres ont pu revenir de leurs péripéties dans les Maleterres retrouver le calme de la hutte, dont ils avaient besoin après leur voyage éprouvant, sans avoir à faire face à une menace immédiate alentour. J'espère que Shai'ri et toi pourrez aussi revenir un jour, sereins, libres, délivrés du mal-qui-ronge.

J'ai lu encore et encore la narrance que tu as fait de ce que Uon'go t'a montré et appris concernant ce Vi'griot. Et aussi ce que tu as confié sur tes réflexions et tes pensées. Oui la mort d'un troll, c'est un grand malheur, qui qu'il soit. La mort c'est la fin de tout. Les secrets sont emportés. Le pardon est confisqué. Un troll en vie peut continuer d'apprendre, devenir meilleur. Donner la mort c'est voler cette possibilité à venir. C'est le plus grand sacrilège dont notre Créateur puisse être témoin.

Ce qui m'amène au Vulpérin Iko, l'ami fraternel de Métti, je ne remets pas en question ce qu'il voit parce qu'il n'est pas troll, mais je te mets en garde contre son interprétation. Les songeries accordent quelques intuitions, ou nous égarent plus généralement, mais rien de plus. Tu écris qu'il « voit le futur » mais l'avenir n'est pas comme une fresque gravée sur un mur qu'on peut contempler. Semblable à un ouragan en pleine mer, imprévisible, il change constamment, de même les visions tourbillonnent. Bien imprudent celui qui dit pouvoir lire au travers avec clarté. Parfois, il est possible d'influer sur le cours de la rivière qui mène à la mer, voilà tout ce que je sais.

Concernant le Vi'griot, comme je l'ai dit, je n'ai aucune savance à son sujet. Uon'go t'a montré ou appris ce qu'il voulait bien te montrer et t'apprendre. Mais la solution qu'il envisage c'est la méthode de sceller ce loa. L'emprisonner. Comme notre père oublié. Comme l'écorcheur d'âmes. Je ne vais pas ici discuter de savoir à quel moment un loa  est trop dangereux et doit être ou non enfermé. Ce n'est pas ce qui m'intéresse. Mais je voudrais te partager ce que cela m'inspire : notre Créateur a disparu, maudit par un de ses fils, il ne peut apparaître et nous transmettre Sa sagesse, toutefois  en dépit de cet état de fait, Sa magie poursuit son œuvre, elle est Sa manifestation, fragile, ne représentant sans doute qu'une trace infirme de Son pouvoir réel suprême, mais elle est là. Son don continue de couler en nous, Sa toute-puissance n'a pas disparu de la surface de ce monde avec lui. Sala'jin raconte qu'il en est de même pour Hakkar à Zul'gurub : même banni et invisible à nos yeux, son emprise demeure. S'il en est ainsi, aucun vévé ou prison ne fera « disparaitre » entièrement le pouvoir et l'effet du Vi'griot. Même enfermé, il restera toujours une réminiscence latente. C'est d'ailleurs en accord avec ce que tu as mentionné sur les gardiens successifs qui tentèrent de le garder scellé mais qui finirent pas en être affectés.

Alors me revient la phrase que tu as attribué à ton frère : un monstre n’est rien de moins qu’un esprit protecteur qu’on a pas appris à aimer. Quand vous avez dû quitter la hutte, je pensais que la priorité devait être de trouver l'arbre de l'empreinte de Uon'go à Zandalar. Mais à l'aube de ces nouvelles informations en ta possession, je me demande si vos efforts ne devraient pas être mis à COMPRENDRE l'origine et la nature de ce loa. De la même façon que pour retrouver le loa oublié nous cherchons à comprendre la nature du sortilège qui l'éloigna de sa progéniture pour trouver comment y remédier. Tu as mentionné les terres drakkari et les Grisonnes. Peut-être qu'en remontant la piste, vous découvrirez d'où ce loa est venu, qui il est, peut-être enfin, comment l'apaiser.

Je repense aux rituels dédiés aux trolls défunts. Certains morts ont besoin d'être guidés. Trop tristes de quitter cette vie, ils refusent d'accepter leur propre mort. Ils aimeraient rester plus longtemps, et envient ceux qui ont la chance d'être encore dans le monde matériel. Ces morts sont jaloux des vivants. Peu à peu, ce sentiment peut se transformer en colère, voire en haine. Quand de telles âmes restent sur Azeroth, elles se changent en spectres monstrueux et s'en prennent aux vivants. Les offrandes et les prières leur donnent une consolation et les apaisent. Et si le Vi'griot était né d'une âme en peine drakkari qui n'avait jamais reçu les hommages et offrandes nécessaires de la part de sa tribu ? Ce n'est qu'une hypothèse parmi tant d'autres.

Reste proche de tes amis comme Moe’makani et Métti. Si tu entrevois les limites de tes capacités, n'aies pas peur de demander de l'aide. Même à tes autres amis comme Jum'sha. Je suis certaine qu'il préférera toujours recevoir une lettre de toi lui demandant de venir, plutôt que recevoir une lettre annonçant que tu n'es plus de ce monde.

Garde courage, foi et ton air souriard, ils sont ta plus grande force.
Atal'makoa loa.

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